Le Conte de la Princesse Kaguya

Le Conte de la Princesse Kaguya
Le Conte de la princesse Kaguya
D'Isao Takahata (Jap, 2h17) animation

On le sait, les garçons naissent dans les choux et les filles dans les roses. Grâce au dernier film d'Isao Takahata, on apprend que les princesses, elles, naissent dans des bambous les soirs de pleine lune. Idée aussi fantastique qu'évidente à l'écran, que le réalisateur a tirée d'un récit fondateur de la littérature japonaise et qu'il a développée pour en faire un conte universel sur la condition féminine, sinon la condition humaine. Car cette princesse, qui grandit de manière surnaturelle, va être prise entre deux feux : ses aspirations et son destin.

Ainsi, lors d'une des premières séquences, elle doit décider si elle suivra des enfants qui l'appellent « pousse de bambou » ou si elle rejoindra son père d'adoption qui l'a baptisée « Princesse » ; l'amitié du peuple et le désir de liberté d'un côté, l'ambition d'une vie d'exception que l'on projette sur sa progéniture de l'autre. C'est la deuxième option qui l'emporte, mais le dilemme est sans cesse redoublé sous de nouvelles formes dans le film, notamment lors de la valse des prétendants que la princesse "rebelle" (les points communs sont nombreux avec le chef-d'œuvre de Pixar) cherche à esquiver.

Cette partie centrale est somptueuse, enchaînant les morceaux de bravoure tout en conservant le style graphique de l'ensemble, proche de l'aquarelle ou du croquis, notamment ce passage sublime où un des soupirants disparaît dans un océan déchaîné dont les vagues se transforment en dragon. Cependant, ce qui frappe le plus dans Le Conte de la Princesse Kaguya, c'est sa façon de cueillir les émotions de son personnage comme une rosée printanière, avec une délicatesse d'observation peu commune dans le cinéma d'animation. Lorsqu'elle accepte, dans un geste de soumission à l'autorité patriarcale non exempt de regrets et de sanglots contenus, d'accomplir les rêves de fortune de celui qui l'a élevée, ou quand elle doit dire adieu à une humanité qu'elle a aimée malgré les déceptions qu'elle lui a procurées...

En cela, comme Le Tombeau des lucioles, l'autre chef-d'œuvre de Takahata, Le Conte de la Princesse Kaguya est une œuvre où la tristesse des sentiments est exponentielle à la joie suscitée par sa beauté visuelle.

Christophe Chabert

Le Conte de la Princesse Kaguya
D'Isao Takahata (Jap, 2h17) animation

à lire aussi

vous serez sans doute intéressé par...

Vendredi 19 octobre 2018 Le cinéma martinérois Mon Ciné aime le cinéma d’animation, et le fera savoir dimanche 28 et mardi 30 octobre en participant à la Fête du cinéma d’animation organisée (...)
Mardi 5 juillet 2016 Ce mois-ci, le Méliès ressort "Panda, Petit Panda", suite de deux courts-métrages réalisés en 1972 par les deux maîtres japonais de l'animation, à l'époque quasi-débutants.
Mardi 24 juin 2014 Avec "Le Conte de la Princesse Kaguya", Isao Takahata, l’autre génie du Studio Ghibli, sort d’un long silence créatif pour signer ce qui est sans doute son œuvre la plus ambitieuse et la plus accomplie. Rencontre avec un cinéaste d’animation...

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X