Adrien Mondot, petit prince des arts numériques, revient à l'Hexagone de Meylan (où il a été en résidence pendant trois ans) accompagné de Claire Bardainne, plasticienne, designer graphique et scénographe avec qui il s'est associé artistiquement en 2011 – la compagnie s'appelle maintenant Adrien M / Claire B. Leur nouvelle proposition baptisée "Le Mouvement de l'air" vient tout jute d'être créée : on n'a donc pas pu la voir. Mais comme leur travail est toujours passionnant et reconnaissable entre mille, on les a contactés pour en savoir plus.
Le Mouvement de l'air est un titre assez explicite. Le spectacle parle donc de l'air...
Claire Bardainne : Oui, bravo !
Mais encore ?!
Adrien Mondot : C'est un parcours de sensations comme on aime les faire. C'est-à-dire que la trame narrative n'a rien d'explicite comme dans un spectacle de théâtre basé sur un texte. Ce qui nous intéresse, c'est comment le mouvement fait naître des émotions.
CB : Ça parle, même si ce ne sont que des sensations, de l'imaginaire de l'air en essayant de suivre le voyage d'un mouvement d'air. Aller de quelque chose de très doux de l'ordre de la brume à quelque chose de plus violent, de plus incarné.
Pour ce projet, vous avez travaillé avec un chorégraphe (Yan Raballand) comme vous l'aviez déjà fait dans Pixel, le spectacle créé l'an passé avec Mourad Merzouki ...
CB : Oui, mais Pixel était une pièce particulière dont on a porté la direction artistique avec Mourad. Là, on est dans notre propre univers : on a invité un chorégraphe à rentrer dedans pour nous aider à en exprimer les moindres nuances. On se rend bien compte que lors de la rencontre entre l'image et le corps, il ne faut pas qu'il y en ait un qui soit en deçà de l'autre.
Votre univers est fascinant, avec des images très fortes... Mais comment, avec le temps, dépasser le "simple" effet de sidération qu'il provoque chez les spectateurs ?
CB : J'ai l'impression que ce spectacle est peut-être plus contemplatif que les autres. Il vient du coup moins chercher du côté de la surprise que de sensations qui sont plus de l'ordre de l'imperceptible, de l'invisibilité de l'air... On est moins dans le côté percutant de Pixel par exemple.
AM : C'est peut-être un spectacle plus exigeant pour le spectateur aussi, comme les portes d'entrée sont moins grandes ouvertes.
Depuis les Jeunes Talents Cirque de 2004, vous en avez fait du chemin Adrien ! Quel regard portez-vous sur ce parcours assez exceptionnel, votre compagnie connaissant aujourd'hui un grand succès, avec un nombre conséquent de représentations en France mais aussi à l'étranger (ils partaient jouer Le Mouvement de l'air à Rome au moment de l'interview) ?
AM : On est des artisans, on ne fait pas trop de constat. Ce qui est précieux pour moi, c'est la rencontre avec Claire qui a ouvert d'autres espaces de recherche. J'ai pu creuser à des endroits où j'étais bien incapable d'aller.
CB : À deux, on a l'impression que l'horizon est très très vaste, qu'on est loin d'en avoir fait le tour. On n'est pas dans une ambition de progression exponentielle, au contraire. Le Mouvement de l'air est l'un des projets les plus ambitieux que l'on ait montés, mais les prochains ne seront pas de plus en plus grands. Il est tout à fait probable que l'on revienne à un solo ou à des installations plus réduites.
AM : On aime faire les choses nous-mêmes et on se rend compte que l'artisanat est un truc précieux qu'on ne veut pas lâcher. On ne veut pas être directeurs d'une grosse structure ou d'une grosse compagnie mais continuer à faire des spectacles à taille humaine.
Le Mouvement de l'air, du mardi 3 au jeudi 5 novembre à 20h et le vendredi 6 novembre à 14h15, à l'Hexagone (Meylan)
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Making of
Si l'on n'a pas pu voir le spectacle avant sa venue à Meylan, on sait déjà qu'Adrien Mondot et Claire Bardainne seront toujours sur la même ligne : celle de mettre « l'humain au centre de la technologie » grâce à trois interprètes au plateau et à leur logiciel eMotion qui permet « un travail métaphorique ». Adrien Mondot : « L'ordinateur est un outil pour développer un imaginaire sur scène. Concrètement, tout est manipulé en direct » (les danseurs interagissent avec les images projetées sur scène). Claire Bardainne : « Ça donne du coup la possibilité au spectacle d'évoluer aussi dans sa partition numérique, avec les interprètes. Que ça ne soit pas la même chose de la première à la dernière représentation. »