Difficile à croire, mais les films de Sergio Leone ne sont pas visibles sur les écrans depuis de nombreuses années. Même en DVD, la copie de Pour une poignée de dollars est médiocre. À cela s'ajoutent les nombreuses versions de ses films, fruits d'incessants remontages liés aux exigences des producteurs. L'intégrale que lui consacre le festival Lumière est donc un événement : non seulement la plupart des copies ont été fraîchement restaurées (notamment celles d'Il était une fois la Révolution et du Bon, la brute et le truand, enfin dans leurs montages définitifs), mais elle permettra d'envisager l'importance capitale de cette oeuvre dans le cinéma mondial. Leone est certes l'inventeur du western à l'italienne (laissons le terme “western-spaghetti” à tous ceux qui l'imitèrent par la suite...) qui est autant une relecture qu'une renaissance du genre par un de ses admirateurs les plus fervents. Mais c'est surtout un adepte d'un cinéma total : spectaculaire, riche en émotions, ambitieux formellement, moderne face à l'histoire de son art et révolutionnaire face à l'Histoire tout court. Un cinéma qui passera, en vingt ans à peine, de l'archétype fulgurant (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus) à l'invention libre, poétique et méditative (Il était une fois en Amérique, un des dix meilleurs films de tous les temps). Son oeuvre, brève (sept films seulement, tous indispensables, même ce péplum étrange qu'est Le Colosse de Rhodes), sera complétée pour cette intégrale par les deux films qu'il a produits (Mon nom est personne, remarquable, et Un génie, deux associés, une cloche, plus anecdotique) mais aussi, rareté, par un film muet tourné par son père, La Contessa Sara.
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