Seul artiste contemporain exposé dans la belle exposition "Le Dessin en couleurs", parmi des œuvres d'artistes illustres (Le Douanier Rousseau, Roberto Matta, Oskar Bergman, Jean Tinguely, Pierre Tal-Coat...), Frédéric Khodja se livre ici au difficile exercice du commentaire (détaillé) de sa propre création intitulée "Zorzi".
«Zorzi est un dessin aux crayons de couleur, dessin dessiné sur vélin de Rives au printemps 2011, dessin dessiné également, dès ses débuts et à la toute fin de sa construction, avec de petites gommes blanches taillées comme des silex. La feuille épaisse mesure un mètre soixante par un mètre vingt, l'image est installée au centre du papier et mesure cent deux centimètres par soixante treize centimètres. Les plans colorés sont distincts et fondus, les passages des verts, des bruns, des gris et des bleus sont visibles et mêlés. Un événement amplifie la composition du récit interne de ce paysage doté d'arbres, de rochers et d'un ciel : un volume crayeux dans la partie droite, en suspension quasiment au premier plan, élément percé d'un oculus le faisant masque et ossement tout à la fois.
L'événement se répercute de l'autre côté du dessin avec la présence d'une cascade gelée qui modifie l'arbre en surplomb : trois masses de stalactites se forment entre les branches. Zorzi est un montage atmosphérique. Si je reprends le carnet sur lequel j'ai tracé les prémisses du dessin, je lis : "Un jour de tempête et la rencontre des ossements d'un paysage". Je retrouve mon esquisse au stylo-bille d'avril 2011, à gauche la cascade et les stalactites sont imaginées en vert et recouvrent un second petit os troué dans le plan médian, fragment qui semble s'être décroché de la forme. Ce petit os est maintenant dans l'invisibilité. Ce dessin comme les autres est une fiction. Le résultat stratifié d'obsessions visuelles et de documents mémorisés, de gisements (au cours de l'hiver 2011, je replongeais dans les peintures de Giorgione et celle d'Ensor). Considérons le dessin comme une table tournante !».
Le Dessin en couleurs
A la galerie Michel Descours, jusqu'au samedi 4 mai