Une Fête des Lumières 2019 un brin poussive

Une Fête des Lumières 2019 un brin poussive

Visite Guidée / La dernière édition de la Fête des Lumières sous l'ère Collomb (sauf magie des élections) s'avère décevante dans ce que nous avons pu en voir en pré-ouverture dans les grands lieux. Et c'est Jérôme Donna sur la place des Célestins qui tire le mieux son épingle du jeu, avec le plus politique Romain Tardy.

Basique et tout feu tout flamme à la fois, la place des Terreaux, rendue aux Lyonnais après de longs travaux, est à nouveau le réceptacle d'un récit, celui de la naissance de la lumière qui remet le monde en branle par Benoît Quéro et les Allumeurs d'Images. Ultra-rythmée, cette boucle épuise et paraît déjà vue quoiqu'elle soit fort maîtrisée et produise de belles images.

On attendait tant des Théoriz devenus grands qui accèdent au Graal de la primatiale Saint-Jean. Hélas, ce Genesis foisonnant (et particulièrement réussi sur la séquence des saisons), demeure trop illustratif pour séduire vraiment et faire de ce bâtiment le cœur battant de la Fête. Toutefois, l'embrasement en lumière de la primatiale ne manque pas de panache dans une France qui a tant et plus (que les humains) pleuré Notre-Dame.

En revanche, sur la colline de Fourvière, CozTen a su éteindre le déluge de couleurs qui s'abattaient sur son flanc l'an dernier avec Damien Fontaine. Cette fois-ci, des Cueilleurs de nuages réduisent ces derniers en eau afin de faire grandir une fleur (sur le palais de justice). Jusqu'à créer une inondation. Déployant son histoire sur le jardin du Rosaire et contre l'abside de la cathédrale, il choisit une fable naïve pour illuminer sagement cette immense surface.

Même problème d'eau pour Ralf Lottig sur la place des Jacobins mais autant son Tricolore dans la cour de l'Hôtel de Ville l'an dernier était puissant, autant il fait pâle figure autour de la fontaine avec quelques simples lasers ondulants figurant les eaux agitées. Joël Pommerat et son créateur lumière Éric Soyer faisaient aussi bien et même mieux dans Pinocchio il y a dix ans lorsque la marionnette était attrapée par la baleine...

Côté place Bellecour, la formule de la déambulation qui avait si bien fonctionné l'an dernier avec les Anookis a été reconduite aux dépens des projections de films sur le cœur de la grand roue, mais l'alimentation des 500 pampas de TILT ne permet pas de se glisser partout. La circulation se fait donc par îlots. Heureusement que les luminéoles de Christophe Martine égayent cet espace, de Prairie éphémère, rendu paradoxalement très froid.

Dans la cour de l'Hôtel-Dieu, la multi-intrumentiste Lucie Atunes signe une partition très enivrante qui enrobe un ballet mécanique de lasers au sol. Là encore, la comparaison avec les Réflexions d'Yves Caizergues ne bénéficie pas à ce Coda plus modeste et qui manque d'ampleur.

La très belle surprise est venue de Jérôme Donna et la direction de l'éclairage urbain place des Célestins. Ce n'est pas la première fois que cet artiste s'avère bluffant. Sa simplicité est son atout premier, comme en témoigne le merveilleux Rêves d'enfants qu'il avait installé montée de la Grande Côte en 2011. Il choisit là d'éclairer non pas la seule façade du théâtre mais celles adjacentes par l'explosion de son Lightning Cloud. Si la fragmentation de ses milliards de données compressées se traduit par des projections plus que par des éclats de lumières, il n'en demeure pas moins que l'objet-même du cloud est splendide et permet d'exister pendant la boucle de spectacle et aussi dans les temps morts. Et de jouer autant avec les scintillements que le sombre. Astucieux et sacrément réussi.

Enfin, ce n'est pas l'installation la plus séduisante a priori (manque certain de couleurs !) mais c'est celle qui porte un vrai propos. Place Sathonay, dans The Great indecision council, Romain Tardy, pionnier du Vjing, a installé pour sa première venue à la Fête une couronne de matrices de lettres. Une voix-off et mécanique énumère les mots les plus recherchés sur Google au moment présent et leurs lettres défilent autour de nous. Ainsi, ce mercredi 4 décembre au soir, entendait-on : Elisabeth Borne, SNCF, Michael Jordan, handball, le programme de Garorock, Spotify, David Beckham, Yann-Arthus Bertrand, la grève du 5 décembre...

Et soudain, aucune envie d'aviver une quelconque poésie ou un rêve. Mais faire de l'art de la lumière une matière à réfléchir sérieusement le monde. Ce n'est jamais de trop.

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