Entretien / La Friche Lamartine, lieu de travail, de création, de résidence pour de nombreux artistes, attendait une solution de relogement depuis de longs mois. Tout s'est accéléré depuis l'été et deux sites seront finalement investis au printemps prochain, dont l'un pouvant désormais accueillir du public. Le point avec Loïc Graber, l'adjoint à la Culture de la Ville.
Quelle solution de relogement a été trouvée pour les artistes de la Friche Lamartine ?
Loïc Graber : Historiquement, la Ville de Lyon a toujours eu un rapport particulier avec les artistes de la Friche RVI, puis celle de Lamartine. Quand ils se sont installés à Lamartine, ça a été compliqué car c'était un site plus petit et ça avait déjà donné lieu de leur part à un travail important de recomposition du noyau dur, de sélection des disciplines et des artistes accueillis sur le nouveau site. La Friche Lamartine avait été mise à disposition pour une durée provisoire, étant fléchée dès le départ pour une extension du stade Foé.
Extension du stade qui devait avoir lieu il y a deux ans...
C'est ça. Donc, nous avons pris l'engagement à ce moment-là de ne pas mettre les artistes à la rue, de par cette histoire remontant à RVI, mais encore fallait-il trouver une solution de relogement. Il s'avère que le patrimoine immobilier de Lyon est en train de se réduire comme peau de chagrin, en particulier sur les grands espaces un peu bruts de décoffrage. C'est à dire d'un espace qu'ils pourraient investir et transformer à leur guise : on en a de moins en moins.
Il était question d'un site nommé La Robinetterie, dans le 3e arrondissement.
Effectivement, La Robinetterie est l'un des deux sites fléchés pour la relocalisation. Mais comme c'est plus petit - 1000m2 au lieu de 3000m2 à Lamartine, on va mettre à leur disposition un second lieu, dans le 9e arrondissement : le site Tissot. Qui va leur permettre de relocaliser, peut-être pas la totalité des artistes, mais un grand nombre. Et surtout de ne pas perdre de disciplines.
On a alors rencontré des difficultés, et j'assume la part de responsabilité de la Ville. On a fléché une somme d'argent, importante, de 1, 5 millions d'euros pour cette opération de relocalisation - il ne s'agissait pas pour nous de donner les clés du bâtiment en disant : « vous en faites ce que vous voulez ». En tant que propriétaire, nous mettons à disposition ce bâtiment, nous sommes tenus d'assurer la sécurité. Très vite dans les discussions est arrivée la question d'accueil du public. Aujourd'hui, à la Friche Lamartine, ils ne peuvent plus le faire. Ils l'ont fait de manière dérogatoire, mais depuis la fin de 2017 les pompiers ont dit que c'était terminé, que le dérogatoire n'était plus possible. On a alors fait le choix, avec eux, et c'était un choix complexe avec des conséquences financières directes, de privilégier à La Robinetterie un site ERP, aux normes pour accueillir du public dans de bonnes conditions. Pour nous comme pour eux, c'est un gage de sécurité. Le problème, c'est que l'on n'avait pas forcément perçu les conséquences de la mise aux normes ERP qui consomme la totalité des crédits alloués, pour le seul site de la Robinetterie, où tout est pris en charge par la Ville.
Le site Tissot, on va le mettre à disposition de manière relativement brute, mais par contre on a un deal avec les artistes : il n'accueille pas de public. C'est vraiment un outil de travail. Qui plus est, on a pu trouver quelques crédits supplémentaires pour leur permettre de faire des aménagements intérieurs.
On a vraiment eu un travail en partenariat avec eux ces trois derniers mois, de manière à ce qu'il corresponde à leurs attentes. C'était compliqué car ce n'est pas une méthode de travail que l'on a à la Ville habituellement, la direction de la construction ne travaille pas pour des publics extérieurs. Tout le monde a joué le jeu ! Les travaux ont démarré à La Robinetterie, on commence par le désamiantage, jusqu'au printemps. Ils vont démarrer bientôt sur Tissot. On espère livrer les sites en mai ou juin 2019.
Je suis satisfait que l'on trouve une solution co-construite. Ça correspond aussi à une ligne que je défend pour la Ville : avoir des institutions culturelles fortes, des lieux émergents, mais aussi d'autres lieux qui sont alternatifs, complètement autogérés, à qui nous mettons juste des lieux à disposition, car c'est là où se créent des formes d'art alternatives qui sont nécessaires pour bousculer nos habitudes et innover. Ces lieux sont nécessaires, notre rôle est de les accompagner. Notre difficulté c'est le foncier, on verra comment la Métropole se positionne - elle en a plus que la Ville : car nous avons d'autres projets dans les cartons.