Mercato / Le successeur de Guy Walter à la tête de la Villa Gillet est désormais connu et c'est une femme : il s'agit de Lucie Campos, membre du jury du Booker International Prize et de la revue La Vie des idées. Elle prendra son poste le 1er novembre.
Guy Walter, l'historique directeur de la Villa Gillet, a pris sa retraite avant l'été. La question de sa succession était donc posée depuis plusieurs mois, avec d'autant plus d'acuité que les tutelles (Région, Ville, DRAC) réfléchissaient en parallèle à l'évolution du modèle et au projet à défendre dans le futur par ce lieu créé en 1989, le jeune retraité l'incarnant autant qu'un Thierry Frémaux à l'Institut Lumière et l'ayant clairement marqué de son empreinte durant 30 ans, l'imposant comme un spot incontournable des idées et de la littérature en France, à travers en particulier les Assises Internationales du Roman.
Un audit a ainsi été commandé à un cabinet extérieur en début d'année, afin d'évaluer les possibles changements comme les désirs et idées de l'équipe en place, fortement réduite après la baisse drastique de subventions faisant suite à un rapport incisif de la Chambre Régionale des Comptes début 2016, qui mettait alors autant en cause la légereté de la gestion par l'association que l'absence de réel contrôle par les collectivités la finançant.
34 dossiers de candidatures ont été reçus après publication de l'appel à projets. Huit candidats (dont un duo et un collectif) ont été retenus, après écrémage de la première vague, de manière paritaire. Et le jury, auquel participait entre autres l'élu à la Culture de la Ville Loïc Graber, la vice-présidente à la Culture de la Région Florence Verney-Carron, la DRAC ou encore Michel Lussault, le président de la Villa Gillet, a auditionné les candidats le mardi 4 juin. Une heure chacun pour présenter son projet. Selon Michel Lussault, « nous étions heureux à la fin de cette journée, car tous les dossiers étaient à la hauteur des enjeux et les propositions étaient charpentées et originales : de très bons dossiers. »
Lucie Campos, pour viser l'international...
Le choix du jury s'est finalement porté sur Lucie Campos. Qui est présentée ainsi dans le communiqué de la Villa Gillet : « née à Dublin et élevée à Paris, elle est Normalienne, agrégée de lettres modernes, titulaire d'un master de l'université de Cambridge, puis Docteure en littérature comparée. Elle a enseigné la littérature comparée et l'histoire des idées dans les universités de Poitiers, Caen, Toulouse, Reims et Sciences Po Paris. Elle est l'auteure de plusieurs publications sur Sebald, Kertész et Coetzee et a gagné le prix Hungarica pour son livre Fictions de l'après. Après avoir collaboré avec l'UNESCO – Centre du Patrimoine Mondial, elle rejoint l'Institut français pour mettre en place, avec le réseau culturel français à l'étranger, un nouveau programme pour le rayonnement des sciences humaines et sociales françaises. De 2012 à 2014, elle intègre l'équipe de Pierre Rosanvallon au Collège de France et la rédaction de la revue La Vie des idées. Attachée livre et débat d'idées à l'ambassade de France au Royaume-Uni de 2014 à 2019, elle a passé les dernières années entre Londres et Paris à développer des projets pour la promotion de la littérature en traduction, dont le South Ken Kids Festival, Beyond Words Festival, European Writers Tour. En 2019-2020, elle est membre du jury du Booker International Prize. »
...et collaborer avec les locaux
En attendant de la voir apposer son empreinte sur ce lieu important, des bribes de son projet ont été dévoilées permettant surtout de déceler une plus grande ouverture aux autres événements littéraires du secteur comme une volonté d'être reconnu plus largement à l'international : « prenant appui sur la reconnaissance du projet transdisciplinaire de la Villa Gillet, Lucie Campos ouvrira des perspectives nouvelles à la croisée de la littérature, de la philosophie et des sciences humaines, du livre et du numérique, du patrimoine. Elle conduira une action qui permettra à la Villa Gillet de s'inscrire pleinement dans les politiques et activités culturelles de Lyon comme de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Elle veillera à nouer des partenariats avec les institutions culturelles, les universités, les festivals de littérature et de débats, les bibliothèques. Elle sera également soucieuse de permettre aux scolaires ainsi qu'aux publics les plus éloignés du monde du livre de découvrir les écritures contemporaines dans toute leur variété. Enfin, l'expérience de Lucie Campos sera un atout précieux pour développer plus encore le rayonnement européen et international de la Villa Gillet. »
Deux autres projets avaient retenu l'attention du jury : celui de Thibaut Sardier (Libération) et celui porté par le collectif parisien expérimental Le Peuple qui Manque de Kantuta Quiros & Aliocha Imhoff. En vain, finalement.
Avant de partir, Guy Walter a par ailleurs décidé de relancer son festival des idées Mode d'Emploi, supprimé il y a trois ans par manque de budget et remplacé par La Chose Publique, porté en collaboration avec l'association Res Publica. Rebaptisé (Re)faire Société : Mode d'Emploi, ce rendez-vous des sciences sociales se déroulera du 13 au 20 novembre 2019.
Res Publica de son côté a décidé d'annuler l'édition 2019 de son festival La Chose Publique, mais le relancera en 2020 dans un autre lieu et avec un autre porteur de projet.