Les coureurs de fond

Les coureurs de fond
Théâtre / Et de sept ! En créant Le Dépit amoureux et L'Étourdi ou les contretemps, Christian Schiaretti ajoute cette saison deux autres farces de Molière à son ouvrage entamé en 2007. Comme précédemment dans Coriolan ou Par-dessus bord, la même troupe de jeunes comédiens entame un nouveau marathon pour servir ces textes en vers délicieux d'intelligence et de vocabulaire désuet (connaissiez-vous ce doux verbe «désatrister» ?). Les intrigues ne se démarquent pas par leur originalité, puisque les quiproquos entre amoureux promis et tromperies vont bon train ; ce qui impressionne ici, c'est la qualité de l'écriture et l'extraordinaire matière à jeu qu'elle constitue pour les acteurs. Molière est un grand joueur, il se régale à construire une mécanique extrêmement fluide de la diction qui permet de jouer en staccato — les syllabes se détachent — et en même temps à grande vitesse, presque trop parfois ; gare au moment d'inattention dont pourrait faire preuve un spectateur ! Le décor de tréteaux, inspiré de celui que Molière trimballait sur les routes de France avant d'être adoubé par Louis XIV, est aussi totalement au service des acteurs. Les portes sont creuses, tous les comédiens sont constamment à vue mais rien de tout cela ne trouble la compréhension : il est parfaitement aisé de saisir quel personnage interpelle qui. Et puis, comme souvent au TNP, l'équipe des costumes a cousu des écrins pour draper les personnages. Alors que d'autres se seraient contenter de présenter une seule pièce, Schiaretti et sa troupe enchainent deux spectacles d'1h30 d'égale maitrise : une générosité et un enthousiasme pour le jeu assez rare pour être dit et surtout conseillé. Nadja Pobel

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