Musique / Inclassables parmi les inclassables, les Anglais de Hood explorent des territoires brumeux, peuplés de guitares post-rock, de crépitements électroniques et de mélodies fantomatiques. Précieux.Emmanuel Alarco
Des arbres aux couleurs automnales, une cahute perdue au milieu d'une prairie désolée, des buissons plus ou moins fleuris... Depuis leurs premiers pas discographiques au milieu des années 90, les gars de Hood ne font rien pour arranger les choses et nous réconcilier avec le faux ami qui leur sert de patronyme. En effet, contrairement à ce qu'un certain Robin voudrait nous faire croire, "hood" ne signifie en aucun cas "bois", mais bel et bien "capuche" ou "cagoule" et la musique des frères Adams, pourtant chargée d'humeurs sylvestres, est finalement plus proche de ce genre d'accoutrements que de la verte campagne anglaise. Les capuches des shoegazers du début des années 90 dont l'ombre plane sur les premiers enregistrements ; des électroniciens qui viendront foutre le bordel dans un rock jusque là "classique" ; des rappeurs qui rallieront ensuite l'équipage pour atteindre les sommets. Hood est un groupe en perpétuelle mutation (ne serait-ce qu'au niveau du personnel), toujours en quête de nouvelles sensations et d'horizons inconnus. Atmosphères, atmosphères...Tout commence pourtant bêtement avec des guitares, du rock, nourri de bruyants américains, mais à la mélancolie toute britannique, limite curiste. Pas de quoi se relever la nuit, mais de belles promesses. Il faut attendre Rustic houses, forlorn valleys en 1998 et plus encore son successeur The Cycle of days and seasons l'année suivante, pour assister à la première mue significative. Voix lointaines triturées en tous sens, cuivres, bois, cordes passés à la moulinette, à l'endroit comme à l'envers, batteries aériennes, samples torturés... Le son Hood est né. Oubliant le format pop, les frères Adams et leurs acolytes reprennent le flambeau allumé par Talk Talk et leur Laughing stock, à coups de grandes plages atmosphériques peuplées de fantômes (normal, Matt Elliott est dans le coup) et scandées par de rares mais redoutables montées d'adrénaline. Le tableau a déjà de la gueule, il se transformera deux ans plus tard en véritable toile de maître avec Cold house et ses chansons aux contours (sublimes) plus précis. Le son est toujours aussi singulier et avide de sang neuf : l'électronique est poussée dans ses derniers retranchements et l'improbable union avec les rappeurs de la maison Anticon, Why ? et Dose one, embrase le tout. Folktronica et hip-hop expérimental convolent en justes noces, la messe est dite. Plus de trois ans après de telles émotions, l'attente était forcément grande, trop grande et la sortie en janvier de Outside Closer ne pouvait que nous laisser sur notre faim. The lost you et The Negatives, singles évidents et exceptionnels, y sont escortés par quelques morceaux tout à fait dignes (venant d'un autre groupe on trouverait peut-être même ça génial !), mais un peu "en dedans", entraînant une fréquentation forcément moins assidue des platines. Malgré tout, la perspective d'admirer la créature en live a de quoi faire frémir car au final, capuche, cagoule ou même bois, les disques de Hood sont définitivement de vrais amis.Hoodà EVE le 10 avril"Outside closer" (Domino/PIAS)