Musique / Imaginez le pont supérieur d'un ferry en partance de la côte suédoise au lever du jour, une jeune femme la tête engoncée dans les épaules. Le tout dans un décor à la Fargo des frères Coen. C'est à peu de chose près ce qu'on ressent à l'écoute d'El Perro del Mar, le projet solo de la scandinave Sarah Assbring. Dans une atmosphère aérienne et classieuse, entre Nancy Sinatra et Diana Ross version pop, sa voix planante nous transporte immédiatement en un lieu aseptisant aux couleurs pastel et à l'aurore naissante. Malgré une légère impression de romantico-lissé qui disparaît en quelques secondes à peine, la fragile Sarah nous conquit par son habileté à façonner le style pop 60's, très kitsch, afin d'en redéfinir des sensations moins fleur bleue. Trompette, piano, claviers vintages, basse moelleuse, contrebasse et même hautbois, la suédoise exploite une large gamme d'instruments, tous utilisés avec un son rond. Ils lui permettent d'ériger des chansons suaves et volontairement naïves dans un style très “nordique“, vaporeux et confiné. Des chuchoteries pour adultes consentants, constamment sur le fil, mais sans glisser dans l'excès. C'est un fait, la chanteuse s'épanouit davantage dans la composition musicale que dans la performance littéraire. Sur seulement quelques phrasés répétés au long des morceaux, la sirène vagabonde vocalement, créant des harmonies délicates et des choeurs volatiles. Sarah Assbring est un mystère, impression grandement accentuée par son patronyme ibérique et son faciès troublant, à la fois expressif et inanimé planté sur un corps élancé, presque famélique. Une excursion intimiste en première partie des danois d'Under Byen, définitivement soutenus et adoptés par l'équipe du Ciel.
Patrice COEYTAUXEl Perro Del Mar + Under Byen
Sam 04 oct à 20h30, au Ciel.