L'enfer et les autres

L'enfer et les autres

Sale gosse intronisé à tort porte-parole du trip hop, Tricky revient sur scène défendre son dernier opus, Knowle West Boy.François Cau

Ceux qui ont eu la chance de le voir sur scène le savent. Le Tricky kid débarque avec son passif inscrit sur son corps bardé d'impressionnants tattoos, marqué sur sa gueule renfrognée, gravé dans sa voix d'outre-tombe à même de faire frissonner les plus rétifs. Dans les mauvais jours, son mal-être le faisait arriver sous forte influence, grommelant ses lyrics avant de se tirer au bout d'une petite demi-heure. Mégalo, inconscient, méprisant, ou intègre au dernier degré ? Probablement un peu de tout ça à la fois. Tricky n'a cure de l'aura puissante entourant son nom. En son temps, il préféra claquer la porte à la gueule des membres de Massive Attack, alors en pleine ascension fulgurante, plutôt que de subir les desideratas de l'industrie du disque. Avec la sublime chanteuse Martina Topley-Bird dans ses valises, il défricha ses obsessions musicales et accoucha du somptueux Maxinquaye, porté par les singles Aftermath et Hell is around the corner, qui portaient déjà en eux la quintessence de son style. Soit une fusion tous azimuts de ses influences sonores pléthoriques, du hip hop au rock en passant par la soul et les premiers bidouillages électroniques, le tout avec un art consommé de la production atmosphérique, où sa voix se fait le bras armé de sa vengeance artistique.Eternelles tensions
Le succès de ce premier essai solo change sa perception de son art à jamais. Gentiment schizo, Tricky déteste la célébrité, mais se fait voir dans des raouts improbables. Conchie ses anciens camarades du trip hop, mais prend soin de leur mettre une fessée déculottée avec le radical Pre-millenium Tension. Cultive son aversion de la représentation médiatique, mais va faire le con habillé en Jean-Paul Gaultier dans Le Cinquième Elément de Luc Besson. L'artiste donne l'impression d'avancer à vue, de se faire fort de n'être jamais là où on l'attend, quitte à se caricaturer de façon gênante. Un gosse qui n'aurait pas eu le temps de grandir et qui infligerait, en réaction, sa crise d'adolescence interminable à un public forcément indulgent, prêt à tout supporter pour que la légende s'écrive devant ses yeux. Après le plombant Angels with dirty faces, les deux albums suivants peinent à se renouveler. Tricky s'éparpille, fait des apparitions au ciné, expose ses photos, se contente de petites apparitions sur d'autres projets plutôt que de privilégier sa propre musique, dont il semble étrangement distant dans l'assez bien nommé Vulnerable. Fort heureusement, avec Knowle West Boy, il se reprend en main et amorce une douce révolution musicale, dans un style plus spontané – en espérant que sa transposition scénique le motivera outre mesure...Tricky / Get well soon / The Young Gods / Lord Fester Combo
Vendredi 13 juillet à Musiques en Stock (Cluses)

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