Retour de bâton

Retour de bâton

Ah, Vincent Delerm ! Objet de discussions intarissable entre partisans indéfectibles et détracteurs résignés. Celui qui caractérise le mieux ce qu'il est coutumier d'appeler la "nouvelle chanson française" est surtout connu pour sa tendance au name-dropping. Et plus largement, pour sa verve – niveau textes, il surpasse de beaucoup les très antipathiques Bénabar, Cali et consorts. On en veut pour preuve son précédent album, l'excellent Les Piqûres d'araignée, où il s'éloignait du format qui le fit connaître (en gros, les clins d'œil perpétuels et l'ultra-référenciation) pour livrer un rendu d'une très grande richesse, tant au niveau littéraire que musical.

Alors forcément, la déception accompagnant son Quinze chansons, dernier disque en date, nous chagrine au plus haut point : quinze morceaux de deux minutes en moyenne, habilement orchestrés (il a rangé le piano-voix de ses débuts) qui racontent le couple, le jeu de la séduction, avec quelques réussites (Un temps pour tout ou Je pense à toi). Delerm évoque aussi le cinéma (Tous les acteurs s'appellent Terence), la photo (Martin Parr, très joli portrait de l'Angleterre des eighties) ou encore Leonard Cohen (From a room). Mais le tout peine à nous surprendre, renvoyant un arrière goût de déjà-vu.

Déception qui se matérialise sur scène, pour cette tournée : dans un décor étudié au millimètre près (ambiance vieillotte de cinémascope avec velours et guirlandes), il créé un véritable spectacle, mais perd l'énergie des premiers concerts, quand il laissait parler ses chansons par elles-mêmes. Il semble aussi se tirer une balle dans le pied : pourquoi, pendant la première heure, interpréter uniquement les titres des premier et dernier albums ? Pour montrer que le danger du "je tourne gentiment en rond" n'a jamais été aussi présent ? Heureusement, il reste la voix de Fanny Ardant, le talent des musiciens, et le côté tendrement attachant de Delerm, showman faussement gauche tout de même très talentueux.

Aurélien Martinez

Vincent Delerm, jeudi 3 décembre à 19h30, à la MC2

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