La programmation du festival Les Femmes s'en mêlent nous inspire, encore, beaucoup, passionnément. Si la soirée de la Bobine se défend bien, gardons en tête que le Ciel est et reste le roi quand l'on en vient à évoquer la jeune scène féminine internationale et indépendante. La troisième soirée nous réjouit d'avance par un savant retour aux sources : de la pop triste venant du nord, faisant souffler sans vergogne son vent de supériorité, assumant avec bonheur son identité que d'aucuns pourraient qualifier de folk neurasthénique – insensibles qu'ils peuvent être à sa force transcendante et victorieuse. C'est l'Allemande Mohna qui prendra soin de nous accommoder à l'obscurité en nous gratifiant d'un son épuré et minimaliste, propice à révéler la beauté glacée des larmes. Sa voix, fantomatique, est celle d'une jeune fille intemporelle et fragile, quand ses mélodies pianotées virevoltent depuis les tréfonds d'une âme blessée. Sans avoir le temps de se remettre, nous resterons pour être terrassés par la puissance dévastatrice et la lucidité inouïe du groupe Our Broken Garden. Un nom à la nostalgie doucement métaphorique qui ne ment pas sur la toile musicale tissée, laquelle restaure la grandeur de bien des clichés : oui, l'on peut dire sans craindre le ridicule que leur musique s'écoute le regard perdu dans les nuages, lors d'une soirée complaisamment pluvieuse ou blotti entre des bras bienveillants. Sa légèreté tout à la fois pesante et aérienne ressemble à celle du renoncement à la joie, à l'acceptation simultanée d'une plénitude apparaissant à la grâce de la mélancolie. Dans les bois, sous la pluie, vers une éclaircie lumineuse... voilà où mènent la rythmique envoûtante et scandée, les cordes mystérieuses enveloppant la voix de la chanteuse, magnifique et magnifiée par une fonction solaire – celle de la plainte à deux vitesses, sauvage et délicate. In the lowlands, The Burial, Garden grow, les titres de l'album Golden sea se succèdent avec un plaisir presque romanesque : l'on navigue entre eux au rythme d'un roman, laissant notre pouls s'harmoniser à la valse virtuose des arrangements de la même manière que les mots enlacent notre imagination lors de la lecture. Une soirée pleine de promesses ? Peut-être.Mohna + Our Broken Garden
Vendredi 1er avril à 20h30 au Ciel