A la première écoute distraite, difficile de se dire qu'on a affaire à un “jeune premier“ : assurance tranquille d'une voix somptueusement brisée, qui ne met pas trente secondes à aller dans des stratosphères évocatrices, tout en nous disant que le monde part en fumée ; le tout avec des choristes au diapason et un backing band à la solidité tout terrain. Ce sont les impressions délivrées par le premier titre, The World (is going up in flames), et qui ne vont aller qu'en se confirmant. I believe in your love, Lovin' you baby, In you (I found a love), des morceaux à la thématique commune (saurez-vous la retrouver ?), nous dévoilent à tour de rôle différentes facettes du crooner que Charles Bradley peut devenir, toujours prêt à frapper en plein cœur au détour d'élancées vocales irrésistibles. Le morceau titre de l'album, No time for dreaming, peut-être celui qui porte le plus en lui l'héritage de James Brown (notamment avec ses « Get on up, get up »), résonne également comme le mantra hautement personnel que l'artiste s'adresse à lui-même, et qui aura défini son parcours. Why is so hard ?, How long et Golden rule (la future bande originale du projet économique de François Hollande ?) empruntent quant à eux la forme de constats amers sur la situation de son pays d'origine, directement cité dans les paroles – comme l'indique le titre de l'album, le rêve américain n'est décidément plus du tout une réalité. Pour clore No time for dreaming, Charles Bradley a choisi Heartaches and Pain, douloureuse ballade dédiée à son frère disparu qui, loin de plomber son premier disque, lui donne encore plus de chaleur et de lumière. Ce n'est pas le moindre mérite d'un album à même de vous réconcilier avec la soul, si d'aventure vous auriez eu l'idée saugrenue de vous fâcher avec elle. FC
Charles Bradley“No time for dreaming“ (Daptone)