Ruy Blas de Victor Hugo : un texte, comme tous les grands, d'une actualité jamais démentie, quelles que soient les époques. Le pouvoir est au cœur de cette tragédie dans laquelle Don Salluste, le roi d'Espagne, tombe pour affaire de mœurs (toute ressemblance avec un fait existant ne serait que pure coïncidence) et monte un stratagème pour se venger de sa femme qui l'a condamné à l'exil. Il la propulse dans les bras de son valet Ruy Blas déguisé en son cousin, le vaurien Don César de Bazan ; un mensonge qui conduira au carnage. À nouveau, Christian Schiaretti, patron du TNP de Villeurbanne, traite du Siècle d'or espagnol (tout se passe dans l'imposant Escurial madrilène) auquel il avait consacré une enthousiasmante trilogie il y a deux ans (trilogie inédite à Grenoble). À nouveau, il signe une fresque avec une vingtaine de comédiens en scène qu'il chorégraphie habilement. Mais malgré un décor sobre et splendide à la fois (surtout dans la première partie, des costumes impeccables, des comédiens obéissants – Robin Renucci en Don Salluste et l'incroyable Juliette Rizou, bouleversante dans La Jeanne de Delteil, plus effacée ici), il plane un parfum d'ennui sur ces trois heures. Trop peu d'émois affleurent. La mécanique, parfaitement huilée, ne suffit pas à donner du corps, de la chair, de la vie à des personnages qui pourtant portent parfois des convictions tribunitiennes hautement recommandables.
Nadja Pobel
Ruy Blas, du mardi 27 au vendredi 30 novembre à 20h, à l'Hexagone (Meylan)