On appelle cela « la malédiction du tube » – bon, en vérité, on vient juste d'inventer ce terme pseudo-scientifique : un jour, on ne sait pas trop comment, on compose un tube qui, quelques temps durant, fait tourner les têtes, chantonner les pommeaux de douche, miroiter d'autres succès. Sauf que derrière plus rien, ou quasi. C'est l'histoire mille fois répétée de mille chanteurs : Patrice Hernandez paie ses impôts depuis trente ans avec Born to be alive quand un Murat eut pu devenir chanteur à minettes après Si je devais manquer de toi – et un duo avec Mylène Farmer. Au lieu de quoi, il est revenu à une vie d'artisan. C'est aussi le cas d'Art Mengo. Beaucoup seraient incapables de citer une autre chanson que Les Parfums de sa vie. Les mêmes peut-être ignorent qu'Art Mengo a poursuivi, depuis 1988, une carrière longue comme le bras, drapé dans l'ombre que lui avait tissé ce soudain trop plein de lumière – culminant avec une Victoire de la Révélation en 1991. Tout au long de ces années, Michel Armengot a accompagné la chanson française, composant pour à peu près tout le monde, à commencer par lui-même, jonglant délicatement avec chanson, jazz, bossa, blues, comme sur son dernier album en date en duo avec Lara Guirao. Pas malheureux, il ironise : « J'ai fait deux succès (Les Parfums de sa vie, Parler d'amour [avec Ute Lemper – nrdlr], trois succès d'estime (Gino, Laisse-moi partir, La mer n'existe pas) et ... cinquante trois succès intimes. »
Art Mengo, vendredi 7 décembre à 20h30, au Théâtre municipal de Grenoble