Peinture / Le peintre français Thierry Carrier propose des séries de portraits à première vue bien austères, mais dont l'intrigante délicatesse se dévoile à mesure que le regard s'y perd. S'il est son premier modèle – ce que l'on vérifie largement dans cette exposition –, cela ne signifie pas que le portrait devient un autoportrait. La nuance est d'importance, car elle détermine la façon d'appréhender le sujet... Et quand l'autoportrait se consacre à discerner ce qui fait la particularité du peintre, Thierry Carrier s'attache plus ici à gommer qu'à mettre en évidence les traces de son moi. Il aborde son visage comme un visage lambda, un support pour exprimer des variations générales. « Si je me peins moi-même, ce n'est pas par narcissisme, mais parce qu'on n'est jamais aussi bien servis que par soi-même : en cherchant une attitude, un regard, j'essaie de rendre un état. » Une recherche d'état qui s'encombre peu de la sacro-sainte fidélité aux traits du modèle. Variables d'une toile à l'autre, ils épousent un cheminement tentant de capturer des impressions, se déforment allègrement à cet effet, sont parfois entraînés dans un tourbillon de matière. Constituant ainsi la grammaire d'une œuvre qui s'épanouit dans le jeu des variations.
Laetitia Giry
Thierry Carrier, jusqu'au 22 décembre à l'Espace Vallès