Electro-world / Kelmti horra, pour l'instant seul et unique album de la Tunisienne Emel Mathlouthi, possède le charme ravageur de la musique orientale en même temps qu'il glace le sang par ses nombreuses saillies rock et vénéneuses. Cela, il le doit à cette jeune femme fougueuse et déterminée, enthousiasmée par la scène et outrée par les injustices étant monnaie courante dans son pays, logiquement engagée au moment du Printemps arabe. Voilà qui tient beaucoup du cliché... Mais il est certaines fois où ce cliché s'impose comme socle fondamental pour expliquer la rage insinuée dans chaque mélodie, tapie sous les airs de velours de quelques accords ou criée dans une note qui dure et hérisse le poil.
Kelmti horra (Ma parole est libre) s'écoute comme une suite d'hymnes gracieux et violents, virulents comme le lion et doux comme l'agneau. Un chant de cygne poignant alliant percussions traditionnelles et sons electro-rock enivrants, du titre Ya Tounes Ya Meskina (Pauvre Tunisie) – où la respiration de la chanteuse se fait haletante, suspendant l'attention d'un auditeur transi –, au petit joyau Ma Ikit (Not found) – démonstration parfaite de l'ampleur du talent de miss Mathlouthi. Alors, poison ou antidote ? Nul besoin de le savoir pour recommander de (re)découvrir tout ça en live, après le passage de la chanteuse l'été dernier au Cabaret frappé...
Laetitia Giry
Emel Mathlouthi, mardi 12 mars à l'Hexagone (Meylan)