Il ne s'agit pas d'altruisme, mais d'« interdépendance » : c'est ainsi que Sébastien Layral, actuellement exposé à l'Espace Vallès, définit son art profondément tourné vers l'humain. Privilégiant le portrait, il cherche à révéler l'autre, autant qu'à se révéler soi-même. Charline Corubolo
L'œuvre est à l'image de l'artiste : impressionnante par sa grandeur. Un détail anatomique sur le physique de Sébastien Layral qui pourrait paraître anecdotique, pourtant son enveloppe charnelle semble avoir conditionné d'une certaine marnière son art. Certes, ses œuvres peuvent être de petites aquarelles, mais celles actuellement dévoilées à l'Espace Vallès tiennent du grand format.
Sur de grandes toiles de lin quasiment brutes, il vient dépeindre un portrait, le sien ou celui de l'autre. Enfermé dans ce corps massif, l'artiste cherche à l'effacer pour ne garder que l'essentiel : l'émotionnel, qui s'évapore dans l'espace. Ainsi la succession d'autoportraits démesurés présentée à l'entrée submerge, positivement, dès le premier contact. C'est le point de départ de la série intitulée Desire, pour laquelle l'artiste a encore une fois (un processus récurent) fait rentrer le modèle au cœur de la création, aboutissant à une pièce complète, à une association de gens.
Chercheur de l'intérieur
C'est la marque de fabrique de Sébastien Layral : faire de ses modèles des acteurs artistiques. Avec Desire, il a transformé ses rencontres en toiles sensorielles dans lesquelles l'autre définit ce que le désir (chaque série est porteuse d'un thème différent) représente pour lui, en couleur. Propre à chacun, la teinte est déposée sur les lèvres, tel un révélateur de personnalité. Un procédé qui mêle l'acte de peindre de l'artiste et l'intervention du modèle sur son propre portrait, à la peinture à l'huile. Quand une jeune femme barre son visage de lignes rouges, un jeune homme esquisse des larmes sang sur ses joues. Cet échange permet aux deux êtres de s'offrir un temps commun, qui induit le médium utilisé et manifeste le besoin vital de Sébastien Layral d'être au contact de l'humain.
Ces portraits ne sont pas des pièces isolées mais des corps qui représentent un « nous ». Derrière tout ce process participatif se cache une volonté de regrouper plusieurs vérités dans un même endroit. L'écriture, fragment de l'œuvre, se greffe souvent à la démarche, et c'est alors qu'on découvre pleinement la force de cet art : un questionnement perpétuel sur l'être et ses émotions, la capacité à interroger le temps et qui, in fine, ne s'arrête pas avec la toile, mais se trouve gravé dans plusieurs interstices.
Desire, jusqu'au samedi 18 octobre, à l'Espace Vallès (Saint-Martin-d'Hères)