En formes de terres


Expo / Choix fort et intéressant de la part du Musée de Grenoble que d'ouvrir ses espaces à David Tremlett. Car si on peut parler de la première rétrospective de cet étonnant artiste anglais voyageur, il l'affirme d'emblée, «le passé me permet d'orienter mon futur et j'aime le changement : je suis plein d'autres projets.» Actuellement affairé à la réalisation de ses wall paintings monumentaux et éphémères sur les parois du Musée de Grenoble, David Tremlett a le contact facile, aime la rencontre et l'échange. Cet état d'esprit humain est à l'image de sa démarche artistique. Ainsi, on plonge dans cette rétrospective un peu comme si on ouvrait ses carnets de voyages, ou qu'on pénétrait dans des espaces traversés, vus, ressentis, et recomposés par lui. Pas de présentation chronologique, mais un mélange de peintures des années 70 aux plus récentes, jouxtant des photographies, des mixtures de tickets de bus, cartes postales d'amis rencontrés lors de ses périples, créant des assemblages vivants. Le tout englobé par des peintures murales (4 dans le grand couloir et 3 autres dans les salles). Ces «sculptures» murales jaillissent comme la synthèse parfaite, bouleversante de tous les autres travaux : peintures de formes, d'angles, de colonnes, de briques, très architecturales aux couleurs ocre, terre, des dessins au crayon, pastel, graphite sur papier. Les formes épurées dans les premières oeuvres reflètent un noir profond ou un gris sur lequel court un texte interrompu en anglais ou dans les langues des pays rencontrés. La couleur flamboyante émerge plus récemment. Le rythme d'une danseuse de claquettes, les harmoniques d'un paysage sont "musicalisés" en lignes crayonnées. Ces productions, nourries de ses voyages solitaires en Afrique, Asie, Amérique Centrale, imprègnées des esthétiques rencontrées, Tremlett les passe au filtre de sa subjectivité, les fond dans ses propres choix formels. Au finale, une centaine d'oeuvres à la légèreté visuelle déploient une profondeur mystérieuse. Séverine DelrieuExposition David Tremlett
Rétrospective 1969-2006 du 8 juillet au 24 septembre au Musée de Grenoble


<< article précédent
«L'Europe vécue»