L'autre mondialisation

Regard / Du haut de ses 17 années d'existence, le festival des 38e rugissants poursuit sa noble mission : interroger les notions d'interculturalité, de créations traditionnelles et contemporaines, et, selon sa formule consacrée, de migrations des esthétiques. François Cau


La réputation du Festival n'est presque plus à faire. Un retentissement national, accentué par le fait que la manifestation est quasiment unique en son genre sur tout le territoire ; des musiciens chevronnés de tous horizons, sélectionnés au gré de leur curiosité et de leur désir de pousser leur musique en dehors de ses limites, de l'ouvrir aux autres ; une mise en avant systématique de la création en son sein, quitte à parier sur des formes inédites et plutôt risquées ; une appréhension de l'art musical comme partie intégrante de la société d'où il émerge ; des soirées et événements "concept", à même de réunir tous les publics autour de leur originalité... Et pourtant, les 38e souffrent encore et toujours d'une image élitiste, d'une incompréhension certaine d'un certain public campant sur ses a priori. Le plus ardu demeure toujours ce putain de premier pas, le fameux saut en avant dans l'inconnu. Au vu de la programmation de cette année, on ne pouvait que vous pousser dans le vide, vous encourager à vaincre ce foutu vertige. On ne va pas prétendre que les 38e sont la solution définitive contre la standardisation de l'industrie de la musique, on vous murmure juste à l'oreille qu'il s'agit là d'une belle et saine alternative, et que le credo de la recherche musicale forcenée n'exclut pas le plaisir sonore.Théâtre de créationsCette 17e édition n'a pas à rougir de la comparaison avec les précédentes. Même si la structure des 38e souffre elle aussi de la baisse globale des subsides dévolus à la culture, Benoît Thierbergien et son équipe ont tout de même pris le soin d'élaborer une programmation de haute volée. En complément des spectacles évoqués dans toute cette page, on pourra jeter une oreille avide à la création vocale ouvrant les hostilités, Silences de Valérie Joly. Un spectacle pour trois chanteuses et une danseuse, inspiré d'un recueil de poésies chantées afghanes ; le court extrait offert en live par la musicienne lors de la présentation du Festival, complainte lancinante enchaînant les cassures de voix en un souffle continu, aura eu raison des réfractaires... Les amateurs de clichés exotiques viendront se prendre une claque en assistant aux concert de didgeridoo (avec Phillip Peris et sa formation trio Free Didj') ; les spectateurs qui avaient découvert le talentueux Keyvan Chemirani dans ce même festival le retrouveront lors d'un concert avec son trio et dans deux créations (Musiques Persanes & Traditionnelles et le très prometteur Tahawol). Et, Année du Brésil oblige, le Festival se clôturera par une soirée brésilienne (Ida e Volta) qui voyagera de la musique baroque à l'expression contemporaine, le tout suivi d'une performance de la Batook grenobloise et de ses invités. Voilà, maintenant, à vous de faire le grand saut.Les 38e Rugissantsdu 30 novembre au 10 décembre


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