Suprêmes Orients

Panorama / Musiques traditionnelles, écritures contemporaines, croisements et rencontres des esthétiques musicales du passé et du présent : c'est toutes les musiques d'un vaste Orient que cette 19e édition des 38e Rugissants embrasse. Séverine Delrieu


Une des grandes qualités de ce Festival, toujours atypique et curieux de nouveaux univers musicaux, c'est sa propension à imaginer des expériences musicales étonnantes. La création occupera en effet une place privilégiée lors de cette dense programmation avec 9 créations (sur 25 rendez-vous), des tentatives artistiques passionnantes. Portées, nourries comme à l'accoutumée par des instrumentistes, chanteurs, danseurs, ensembles, compositeurs d'une qualité rare ; des artistes venus d'orient mais aussi d'occident, ce qui promet des dialogues interculturels forcément féconds, surtout à l'heure où l'incompréhension entre ces deux mondes s'amplifie, et que fantasmes et fausses interprétations ravivent des comportements d'intolé-rance. Les créations, propositions souvent transversales et pluridisciplinaires, croiseront aussi langages et jeux traditionnels issus de moult régions orientales, techniques contemporaines, et musique dite “ savante ”. L'épopée de Gilgamesh, retour à l'Orient mythique, est une partition écrite par Gérard Zinsstag pour ensemble instrumental et dispositif électronique, à laquelle une récitante, un danseur et une vidéo se mêlent. Gazing Point, dialogue transcendant entre un maître du ney, un trompettiste allemand, et un calligraphe, offre des sensations de plénitude fortes. Icons fusionne les mouvements à la fois contemporains, et inspirés des derviches tourneurs du danseur turc Ziya Azazi avec les lignes et sons fous du trompettiste Serge Adam. Les accords d'Orient/OccidentPolyphem Guerre et création, du remarquable compositeur libanais Zad Moultaka, traite le sujet de la guerre à travers un enchaînement de pièces, souvent portées part la voix de la fabuleuse Françoise Kubler. The Baghdad Monologue composé par Alejandro Viñao délivre l'expérience d'une femme au cœur d'un contexte politique critique. Kronos Quartet et le Nieuw Ensemble s'immergent eux dans des pièces de compositeurs contemporains orientaux. Trans Baroque Express rencontre entre l'Atelier des Musiciens du Louvre et de la chanteuse et guitariste libanaise Roula Safar, métisse les répertoires : musiques traditionnelles, baroque avec Monterverdi, compositions du 20e avec Bério, ou celles du grec Alexandros Markeas. Pour le jeune public, le conteur Jean-Jacques Fdida, accompagnés par Haroun Teboul et Keyvan Chemirani aux instruments traditionnels, rapproche toutes les religions. Un duo superbe encore entre le malien Ballake Sissoko à la cora, et le marocain Driss El Maloumi au oud. Enfin, Azalai, une puissante rencontre transsaharienne entre musiciens et chanteurs traditionnels venus d'Egypte, Mali, Maroc, Niger et Tunisie, précédera le dernier jour du Festival, un duo entre l'iranien Keyvan Chemirani et Prabhu Edouard aux tablas et percussions ; et la nuit se poursuivra avec les mix de l'excellentissime DJ Mutamassik.Orient(s) 38e Rugissants du 20 nov au 1 déc, lieux diversdétails de la programmation en pages agenda


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L’érotisme selon Quignard