Un chien andalou


Musique / Tu vois la pochette de son album et tu te dis, hip-hop, forcément ? Tu mets la galette dans le lecteur et ça t'arrache un sourire ironique genre, aïe, un chanteur réaliste qui se prend au sérieux, du premier degré assumé, écorché, torturé, qui chante la misère et le cambouis, l'usine et le bus 137. Tu comprends mal comment la banlieue nord de Paris a pu accoucher d'un guitariste flamenco qui parle de magasins Carrefour et de son rottweiller, de boîtes à vieilles et de caissières charmantes, mais la sauce prend.
Tu te surprends à apprécier ces rythmes sauvages et cette virtuosité : tu fais bien. Dans quelques morceaux, l'homme qui valait trois milliards et quatre centimes d'euros va même te faire rire («Après la deuxième bouteille de blanc, tous les mecs du bar m'appellent Ken le survivant»)... L'auteur de ton trouble (qui aurait pu croire qu'un jour tu succomberais à un balafré aux cheveux ras ?) a des ascendances espagnoles qui se devinent autant par son nom que par sa musique, parvient à mettre du soleil dans le ciel gris et froid qu'il dépeint. Il se permet de citer Jésus Christ en exergue («Ce que vous prenez pour de la faiblesse c'est ma force, c'est l'amour»).
Les instrus, l'écriture sont plus que soignées. Le soleil et l'ouvrier, c'est le deuxième album après Gitan de Paname de ce tatoué au coeur tendre et à la voix rauque, plutôt vivant que triste, qui a accompagné sur scène Mano Solo (avec une reprise de Barbès-Clichy à sa sauce) et Bernard Lavilliers, préfacier de son album, tourné et enregistré avec Sergent Garcia et fait les premières parties de Cali et Anaïs, sans ressembler vraiment à aucun d'entre eux. Un OVNI anachronique et unique. Bernard de VienneBalbino Medellin, en première partie de Bernard LavilliersJeu 22 mai à 20h, au Summum


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Face aux murs