Guillaume Guéraud
(Rouergue)En 2006, Guillaume Guéraud avait donné le ton de la collection «doAdo noir», créée par les éditions du Rouergue pour proposer aux adolescents du polar brut et sans concession. Avec Je mourrai pas gibier et sa chronique d'un jeune homme basculant dans la folie meurtrière, il affirmait un peu plus sa vision du monde, violente et brutale, son écriture nerveuse et son style coup de poing. C'est donc avec plaisir qu'on le retrouve dans cette même collection pour un roman d'anticipation qui navigue cette fois-ci du côté de la SF, avec une référence explicite au Farenheit 451 de Ray Bradbury puisque l'auteur inverse là le postulat de départ. À Rush Island, ce ne sont pas les livres que l'on proscrit, mais les images : le cinéma, la télévision et Internet sont considérés comme aliénants et destructeurs pour le peuple. La brigade de l'œil, sanguinaire et sans pitié, se charge de faire respecter cette fameuse Loi Bradbury en brulant les bobines et les pupilles des citoyens imprudents qui s'y opposent. Parmi eux, le jeune Kao, un adolescent de quinze ans prêt à tout pour retrouver certains films qui, dit-on, auraient échappé à la rafle... Avec ce polar haletant et débridé, Guillaume Guéraud s'oppose aux discours convenus ayant tendance à diaboliser la société de l'image en rendant notamment un très bel hommage au cinéma. La Brigade de l'œil est aussi une charge politique féroce et subtile, transcendée par la transposition dans une société futuriste (l'action se déroule en 2037) qui, hélas, nous rappelle trop souvent la nôtre... YN
