Système d'information sur les armes : une surveillance accrue

Me Thomas Bonzy / Le Système d’information sur les armes a été mis en place pour remplacer l’application de gestion du répertoire informatisé des propriétaires et possesseurs d’armes.

Le ministère de l’Intérieur estime à au moins 4 millions le nombre de détenteurs d’armes chasseurs.

Sous couvert d’une prétendue indispensable numérisation des données, ce dispositif vise à assurer la traçabilité de chaque arme et trouve son origine dans le décret d’application de la loi votée en janvier 2018 qui transpose la directive européenne sur les armes votée en 2017, applicable depuis le 1er août 2018 (décret n° 2018-542 du 29 juin 2018 relatif au régime de la fabrication, du commerce, de l’acquisition et de la détention des armes). Il a fait l’objet d’une concertation entre le Service central des armes (SCA), le cabinet du ministre de l’Intérieur de l’époque Gérard Collomb, et les membres du Comité Guillaume Tell, dont la Fédération nationale des chasseurs.

Le râtelier numérique mais pas que…

Si évidemment on retient essentiellement de ce dispositif la création du Système d’information sur les armes (SIA),  « le râtelier numérique »,  il faut aussi souligner la disparition de la catégorie D 1, soumise à enregistrement, et le basculement des armes concernées à savoir les fusils de chasse à un coup par canon lisse en catégorie C, soumise à déclaration.

Les obligations déclaratives imposées dans le cadre du SIA ne visent pas à remettre en cause le régime juridique actuel : les armes de chasse acquises avant 2011 et qui ne nécessitaient pas de déclaration n’ont pas obligatoirement à être enregistrées dans le SIA. En effet, par exception et en application de l’article 18 du décret du 7 octobre 2011, ne sont donc pas soumises à l’obligation d’enregistrement les armes à canon lisse ne tirant qu’un seul coup par canon, reçues ou acquises avant le 1er décembre 2011.

Le décret supprime également pour les ventes entre particuliers, la possibilité de livraison des armes et des munitions au domicile de l’acquéreur ou de remise directe de la main à la main à partir du 1er août 2018.

Toutefois, la cession, remise ou livraison de l’arme vendue par un particulier à un autre particulier reste toujours autorisée : soit en passant par un professionnel autorisé (armurier), soit par l’intermédiaire d’un professionnel autorisé (courtier).

L’obligation qui s’impose consiste à ce qu’un professionnel agréé puisse consulter, avant chaque transaction, le Fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes (Finiada), dont la consultation est rendue obligatoire, et qu’il vérifie que l’acquéreur remplit les conditions pour acheter l’arme (validation ou licence de tir).

Le cœur du sujet demeure cependant bien la mise en place du SIA et d’un râtelier numérique.

De nombreux dysfonctionnements

Le déploiement de ce nouveau « râtelier numérique » a, depuis sa mise en place, subi de nombreux dysfonctionnements.

En effet, l’espace « Détenteurs » a été ouvert dans un premier temps aux seuls chasseurs (titulaires du permis de chasser) le 8 février 2022. Puis, il a ensuite été ouvert aux détenteurs d’armes héritées et trouvées, le 25 novembre 2022, et enfin aux détenteurs sans licence ni permis (armes acquises avec un certificat médical), le 23 octobre 2023.

Depuis le 27 février 2024, ce sont les 255 000 tireurs sportifs qui doivent créer un compte personnel SIA pour acquérir ou céder une arme ; à partir du deuxième semestre 2024, ce sont les licenciés et les anciens licenciés des fédérations de ball-trap (FFBT) et de ski-biathlon (FFS) qui sont soumis à cette obligation, avant de finir à partir de 2025 par les collectionneurs, détenteurs mineurs, forains et musées.

Initialement fixée au 30 juin 2023, la date limite de création d’un compte SIA pour les chasseurs a été reportée au 31 décembre 2023, puis au 31 décembre 2024, afin officiellement de prendre en compte les difficultés de connexion qui ont pu décourager certains détenteurs et de prendre en compte le cadencement effectif de l’application…

Le décret n° 2024-615 du 27 juin 2024 est venu modifier le décret n° 2022-144 du 8 février 2022 relatif au compte SIA : il repousse au 31 décembre 2024 l’obligation, pour les détenteurs d’armes pour lesquels le compte détenteur individualisé dans le SIA a été mis à disposition avant l’entrée en vigueur du présent décret, d’en créer un et prévoit un délai d’un an pour les détenteurs pour lesquels ce compte sera mis à disposition à compter de sa publication.

Par ailleurs, la prudence doit être de mise pour les déclarants qui disposent d’un délai de six mois à compter de la date de création de leur compte, pour mettre à jour leur râtelier, notamment en y ajoutant une arme qui aurait dû y figurer ou en signalant des erreurs.

Le dispositif emporte des bénéfices

Sous la réserve d’être un bon usager des outils numériques et au-delà de la simplification administrative pour les armuriers et surtout pour les services préfectoraux, tout détenteur désireux d’ouvrir son compte peut le faire aisément et en confiance. L’outil permet notamment d’avoir une visibilité de ses armes et de ses déclarations. Cela a aussi permis de mettre en place un moyen de contact plus aisé avec les services préfectoraux en charge des armes et de générer directement la carte européenne d’arme à feu.

Les Fédérations départementales de chasseurs ont aussi organisé des permanences et des outils afin de faciliter la création des comptes SIA de leurs membres.

Son non-respect emporte des risques

Si les Français sont souvent pointés du doigt pour être des râleurs et particulièrement sujets à la phobie administrative, le non-respect déclaratif est de nature à poser des difficultés.

L’article L317-4-1 du Code de la sécurité intérieure prévoit que : « Sont punies de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende l’acquisition, la cession ou la détention d’une ou de plusieurs armes, de munitions ou de leurs éléments de la catégorie C en l’absence de la déclaration prévue à l’article L. 312-4-1 ou à l’article L. 314-2-1. Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende, lorsque l’infraction est commise en bande organisée. »

C’est aussi incontestablement une mesure de dessaisissement par le préfet qui risque de s’imposer au détenteur.

Des conséquences importantes pour les détenteurs

L’article R312-87 du Code de la sécurité intérieure prévoit en synthèse un croisement de fichiers : le Fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes mentionné à l’article L. 312-16 ; le bulletin n° 2 du casier judiciaire ; le casier judiciaire national automatisé mentionné à l’article 768 du Code de procédure pénale ; le Fichier national de contrôle de la validité des titres ; le traitement Base Adresse Nationale, ainsi que le système de traitement des fédérations concernées (chasse, tir, ball-trap, ski).

Or, certaines dispositions du Code de la sécurité intérieure (CSI) permettent au préfet, dans le cadre de ses pouvoirs de police administrative, d’interdire à une personne d’acquérir et de détenir des armes et de lui ordonner d’avoir à s’en dessaisir.

Ces mesures d’interdiction et de dessaisissement entraînent l’inscription au Fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes par application de l’article L 312-16 du Code de la sécurité intérieure. Cette inscription emporte elle-même une interdiction de pouvoir obtenir la validation du permis de chasser par application de l’article
L 423-15 du Code de l’environnement.

Et depuis le décret n° 2024-615 du 27 juin 2024 portant diverses mesures dans le domaine des armes, les fédérations délégataires de tir sportif, de ball-trap ou de biathlon se voient obligées de refuser ou de retirer la licence aux personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes.

Avant toute transaction, le professionnel agréé doit consulter le Fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes, et vérifier que l’acquéreur remplit les conditions pour acheter l’arme.

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