L'assistance lors de l'expertise médico-légale en cas de préjudice corporel

Me Christophe Guilland / En droit français, le principe indemnitaire repose sur la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit, ceci afin que la victime soit, autant que faire se peut, replacée dans la situation qui aurait été la sienne si l’événement traumatique ne s’était pas produit.

C’est ce que le président Dintilhac, auteur de la nomenclature éponyme listant les postes de préjudice résultant de l’atteinte corporelle, a qualifié d’utopie constructive, tant leur évaluation et, de fait, l’indemnité réparatrice qui en résultera, peuvent être soumises à discussion en fonction de la personne qui doit la verser ou la recevoir.

Il importe donc d’être attentif tout au long du processus indemnitaire, au premier chef duquel se trouve l’expertise médico-légale.

Souvent redouté par les victimes, cet examen est pourtant une étape clé, puisque c’est sur la base du rapport qui sera déposé par le médecin expert, que le régleur de la compagnie d’assurances ou le juge bâtira l’indemnisation réparant le préjudice corporel, physique ou psychique.

Il convient par conséquent d’être particulièrement vigilant lors de la préparation et du déroulement de l’expertise, afin que les conclusions du médecin chargé de conduire les opérations médico-légales soient les plus proches de la situation de la victime, justifiant d’un intérêt quasi systématique à ce que la victime soit accompagnée par son avocat et son médecin.

Le déroulement d’une expertise médico-légale

Que l’on soit dans un cadre amiable ou judiciaire, les opérations d’expertise débutent systématiquement par la désignation d’un médecin chargé d’évaluer le dommage présenté par la victime.
Une fois la mission acceptée par le médecin, les parties, à savoir la victime, le tiers responsable et, le cas échéant, son assureur, sont convoquées, la victime étant au préalable invitée à adresser les pièces médicales dont elle souhaite se prévaloir.

L’examen proprement dit consiste alors dans un premier temps dans l’étude des pièces composant le dossier médical, afin de cerner la cohérence du cheminement thérapeutique et des traitements reçus par la victime.

Le médecin prend également soin de la questionner sur son environnement personnel, familial et professionnel lui permettant de cerner concrètement l’impact de l’accident.

C’est également au cours de cette première étape que la victime pourra exprimer son ressenti personnel, ainsi que les difficultés qu’elle éprouve suite aux bouleversements résultant du fait traumatique.

La partie adverse, composée généralement de l’avocat et du médecin de l’assureur tenu à réparation, pourra également interroger la victime.

L’expertise se poursuivra par l’examen clinique au cours duquel le médecin expert procédera à l’auscultation de la victime, afin d’apprécier l’incapacité fonctionnelle générée par la ou les blessures.

Cet examen est soumis au secret médical et réunit, outre le médecin expert, les médecins mandatés par les parties.

À ce sujet, il est intéressant de noter la possibilité pour la victime de solliciter, si elle le souhaite, la présence de son avocat, étant rappelé que le secret médical appartient strictement au patient qui est le seul à pouvoir en disposer (CA Grenoble, 30 janv. 2024, n°23/01786).

L’expertise se terminera enfin par une discussion technique entre les participants à l’examen, consistant à échanger contradictoirement sur l’évaluation définitive des préjudices présentés par la victime, avec pour objectif que les conclusions qui seront déposées par le médecin expert soient les plus proches de la réalité séquellaire présentée par la victime.

Fort de cela et étant donné la spécificité de cet examen et l’enjeu qui en résulte en termes indemnitaires, chaque victime doit impérativement se poser la question de son accompagnement par des professionnels formés et opérationnels en matière de réparation du préjudice corporel, afin de tendre au plus près à la réparation intégrale à laquelle elle a droit.

L’intérêt d’être assisté en expertise

Dans la mesure où la qualité du rapport d’expertise est fondamentale afin de purger toute difficulté médico-légale lorsque sera abordée la question de la liquidation des préjudices, il semble tout autant indispensable pour une victime de solliciter l’accompagnement d’un avocat spécialisé et d’un médecin formé à la réparation du préjudice corporel qui, outre l’intérêt de se libérer de l’exercice de tri et de classement des pièces médicales à communiquer à l’expert, permet également de rétablir l’égalité des forces en présence le jour de l’expertise.

Une préparation minutieuse de l’accedit

L’avocat de la victime sera tout d’abord particulièrement vigilant sur la désignation du médecin expert, spécialement en matière amiable où celui-ci sera mandaté par la compagnie d’assurances qui procédera in fine au paiement de l’indemnisation…

La question se pose moins en matière judiciaire, puisque l’expert, inscrit sur la liste de la cour d’appel du ressort dans lequel est survenu le fait traumatique, est tenu de déclarer pour quelle compagnie d’assurances il est amené à travailler dans le cadre d’expertises amiables, afin que le juge puisse s’assurer de l’indépendance et de l’impartialité du médecin qu’il a à désigner en fonction des parties au procès.

Une attention particulière sera également portée sur le choix de l’expert en fonction de sa spécialité, qui doit naturellement être en adéquation avec le tableau lésionnel qu’il aura à connaître. Par ailleurs, l’avocat sera vigilant à la rédaction de la mission confiée au médecin expert, à qui il est demandé de se prononcer sur l’intégralité des postes de préjudice que présente la victime.

Ce contrôle n’est pas anodin dans la mesure où nous constatons que, bien souvent, les médecins experts reçoivent de la part des compagnies d’assurances des missions standards ou incomplètes, qui ne permettent pas au médecin de statuer sur l’intégralité des postes de préjudices découlant de l’accident.

Il en résulte une analyse lacunaire qui générera des difficultés au moment de la liquidation des préjudices, dès lors qu’ils n’auront pas été évalués en intégralité.

En outre, l’avocat et le médecin assureront la qualité et la complétude du dossier médical qui sera adressé à l’expert et à l’adversaire, participant ainsi à ce qu’aucun élément ne soit omis lors de l’examen.

Ce sera au cours de la phase préparatoire que l’avocat et le médecin de la victime échangeront sur les difficultés spécifiques que pourrait présenter le dossier et compléteront au besoin les pièces médicales permettant d’éclairer le médecin expert sur le cheminement thérapeutique. Là encore, un contrôle rigoureux des pièces qui seront fournies devra être opéré, afin que l’expert dispose au jour de l’expertise de tous les éléments lui permettant d’apprécier et d’évaluer les postes de préjudices présentés par la victime.

Une présence rassurante et salutaire

L’expertise médico-légale est un exercice bien souvent inconnu des victimes, générateur d’un sentiment d’appréhension bien compréhensible que seule peut atténuer la présence de son avocat et de son médecin lors de l’examen proprement dit.

Par ailleurs, l’accompagnement prendra tout son sens lors de la discussion finale, étape cruciale de l’expertise au cours de laquelle les praticiens échangent sur l’évaluation des postes visés par la mission.

En effet, cette étape consistant à poser des chiffres sur les conséquences de l’événement traumatique s’avère particulièrement déstabilisante pour une victime, qui manque bien naturellement de l’objectivité nécessaire pour se faire. Par ailleurs, la technicité des termes employés ne saurait être appréhendée par un profane qui se retrouverait rapidement distancé, laissant à l’appréciation de l’expert et de la partie adverse l’évaluation de son préjudice.

Aussi, alors que la victime est naturellement libre de se présenter seule en expertise, choisir d’y être assisté permet toutefois de se prémunir d’écueils potentiellement lourds de conséquences.

L’avocat et le médecin assureront la qualité et la complétude du dossier médical qui sera adressé à l’expert et à l’adversaire, participant ainsi à ce qu’aucun élément ne soit omis lors de l’examen.

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