Institut Ophélie : cure de jouvence

« Je lève mon verre à toutes les putains du Danemark ! » lance une femme (la si juste Conchita Paz) qui va revisiter le destin de celles que les arts et les représentations ont figé, déifié ou sanctuarisé. Ophélie n’est pas cette noyée diaphane si souvent peinte. Elle est vivante et sujette d’elle-même, pas l’objet des batailles de pouvoir d’Hamlet contre son oncle qui a assassiné son père. La metteuse en scène Nathalie Garraud et son complice auteur Olivier Saccomano avaient déjà fabriqué le truculent Un Hamlet de moins (passé en catimini à Ramdam en 2021), une façon de fouiller dans la malle shakespearienne et d’en extraire les personnages iconiques pour les réveiller d’un long sommeil.

Sur un plateau cerné de portes sur deux murs, les directeurs du Centre national dramatique de Montpellier aèrent un espace à l’air vicié depuis des siècles : celui que le patriarcat a préempté sur l’autre moitié de l’humanité. Pas de slogan ou de manifeste mais une forme de ballet de comédiennes et comédiens qui traversent l’armée, la (supposée) folie, la littérature, les religions. La Joconde croise son mari et ses enfants, le Christ est qualifié de plus grand polygame de l’Histoire puisque ses (bonnes) sœurs l’ont épousé. Constamment, leur travail oscille entre des faits de jeu très concrets et une pensée incarnée au plateau plutôt que satellisée ou sentencieuse. La convulsion, la jouissance, la douleur sont jouées pour donner chair à des femmes habituées à être réduites à leur tristesse dans des tableaux picturaux ou à leur sourire de ménagères épanouies au foyer dans des publicités d’un autre âge. Institut Ophélie ravive la lutte !

Institut Ophélie
Du 2 au 4 octobre (mer, ven à 20h, jeu à 19h30), aux Célestins ; 5€ à 40€

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