Haute-Fidélité

Musique & BD / La BD et le rock, deux enfants terribles du siècle dernier qui entretiennent naturellement d'étroites relations. Charles Berberian et JC Denis seront à Lyon le 29 juin pour dévoiler leur coup de médiator aux amateurs de leur coup de crayon. Emmanuel Alarco


Cette année, l'opium du Petit Bulletin (et pas seulement de la rédaction !) aura indéniablement été la plongée frénétique dans les carnets autobiographiques de Joann Sfar. En parcourant les centaines de pages de ces pavés aux titres qui en disent déjà long (Harmonica, Ukulélé, Piano...), un phénomène sociologique s'impose : tous les auteurs de BD (ou presque) jouent d'un instrument et passent du coup le plus clair de leur temps libre à taper le bœuf. Certains poussent même le vice jusqu'à former de véritables groupes, comme Jean-Claude Denis (le père de Luc Leroi) et Charles Berberian qui sévissent depuis 1999 sous le nom de Nightbuzz. Ce sont eux et leur folk youngo-dylanien qui essuieront les plâtres du nouveau projet BD & Rock'n'Roll porté par trois maisons fort recommandables : Expérience (Mecque lyonnaise de la BD, pour faire simple), Birdy Birdy Partners (les meilleurs-concerts-du-monde-de-Lyon, c'est eux) et le Sirius (les meilleurs-concerts-du-monde-de-Lyon, c'est souvent chez eux). Un showcase à la Bibliothèque de la Part-Dieu l'après-midi, une expo et un concert le soir, une dédicace le lendemain ; un parcours complet permettant d'embrasser plus largement l'univers de deux hommes de plume et de cordes.Imprimer la légendeC'est un amour débordant pour le rock et sa mythologie qui anime Charles Berberian ; amour qu'il a merveilleusement restitué dans Playlist, sorte de pendant graphique au cultissime Haute Fidélité de Nick Hornby. Le père de Monsieur Jean (avec Dupuy qui, s'il ne figure pas au générique de cet "album solo", y glisse quelques dessins) divague au gré de ses souvenirs de concerts, de disques, dévoile les pochettes-maison de ses mini-discs et livre à l'occasion de très belles digressions autour de chansons fétiches. En témoigne le troublant jeu de miroirs qu'il établit entre La Horde sauvage de Peckinpah et Down by the river de son héros absolu : Neil Young. Mettant en parallèle le légendaire massacre final du film et les joutes électriques entre le loner et son Crazy Horse, Berberian confirme qu'il fait bel et bien partie des grands malades qui pensent que les chansons sont bien plus que de simples successions d'accords et de mots ; que toute la vie est dans le rock'n'roll : que le rock'n'roll est la vie. Qu'une simple phrase de Dylan ou une inflexion vocale de Johnny Cash peuvent éclairer l'existence comme autant d'évangiles païens et qu'un sourire maladroit de Brian Wilson trimballe sûrement autant de vérité que de longs discours sur l'enfance traumatisée. Enfin, dans sa folle embardée de passionné, l'homme sage n'oublie pas de distiller deux ou trois commandements fondamentaux du genre : "Ne jamais écouter son disque préféré avec sa copine. Si on se sépare, il est foutu, il est infecté !". Au nom du Reed, du Bowie et du Saint-Iggy, amen.Nightbuzz (JC Denis & Berberian)Au SiriusMercredi 29 juin à 19h


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