Redneck et ragazzo folk

Musique / Alors que Red est devenu un habitué de la scène alternative française, Piers Faccini vient d'y faire irruption. Quand la country décalée de l'un rencontre la folk intimiste de l'autre, cela donne une jolie date au Transbo le 2 mars. Christophe Chabert


Avant, on croisait Red au comptoir du [Kafé Myzik] où il venait partager quelques plaisirs musicaux . Après, on a écouté ses disques, ses collaborations avec les improvisateurs aventureux de Rectangle, ou même ce formidable album de reprises de Leonard Cohen en version blues mutant. Enfin, on l'avait surpris en clodo jouant de la guitare pendant qu'une ravissante soubrette lui dévoilait son intimité façon aumône dans French Beauty, chef-d'œuvre porno signé John B. Root. Red, figure atypique de l'underground musical français, a délaissé ses pénates villeurbannaises pour retrouver sa Lille natale, et réussi cet exploit étrange de placer sa dégaine de grand escogriffe chez Universal Jazz pour y enregistrer des albums graduellement enthousiasmants. Dernier en date, Nothin' to celebrate est un pari : faire en France un album de country américaine. Red a donc mis son home studio dans sa valise direction New York pour s'imbiber de l'esprit country au contact de quelques maîtres du genre et de la bibine locale. Résultat : le voyage s'est visiblement très bien passé, Red ayant ramené une douzaine de chansons qui font illusion sans pour autant tomber dans le pastiche. Niveau copains, le garçon a tiré la bonne carte en recrutant Bonnie "Prince" Billy qui, non content d'enregistrer quatre disques par an pour sa production personnelle, a trouvé le temps d'en chanter trois avec ce nouvel allié de circonstance dans le combat pour une Americana lucide sur son sort : mal barrée et bien raide. Red possède aussi un certain sens de l'humour, comme en atteste ce morceau où il se lamente sur sa condition de "frigo dans la cuisine". Et du goût, puisqu'il sait choisir ses "choristes" : l'excellente Laetitia Sheriff, Lilloise elle aussi, a bien sûr répondu à l'appel ; étant la seule à réussir du rock féminin américain à la française, il était logique qu'elle file un coup de main à celui qui rend crédible ce projet de country-folk de chez eux de chez nous.Le meilleur et le PiersPiers Faccini. Un nom de crooner italien, des racines du côté de l'Angleterre, la France comme pays d'élection, et une musique qui descend tout droit des songwriters américains, surtout les maîtres folks. Bref, une personnalité à part sur la scène française, d'abord aperçue avec Vincent Segal et Sébastien Martel (la galaxie M), aujourd'hui seul en scène avec sa guitare et des chansons à la séduisante mélancolie, intimiste et nue, un peu serrée sur album (Leave no trace, chez Label Bleu), qu'on espère libérées de leur délicat écrin une fois lancées sur scène. En tout cas, une brillante et judicieuse double affiche pour entamer un mois de mars (enfin !) prometteur en matière de concerts rock...Red et Piers FacciniAu TransbordeurMercredi 2 mars


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