Aramique Krauthamer : le virtuel est bien réel

Originaire de New York et installé à Lyon depuis deux ans, Aramique Krauthamer est à l'origine d'un groupe de travail qui centre ses activités autour du concept de réalité virtuelle : le Reality Research Lab.


« Depuis que je suis installé à Lyon, je souhaite participer au développement de la culture et des arts numériques dans cette ville. J'aimerais participer, avec mes moyens et mes contacts, à l'éclosion et à la croissance de ce que je considère comme l'une des plus importantes pépinières de talents de France. Il ne se passe pas tant de chose à Paris, Lyon est beaucoup plus dynamique dans ce domaine » déclare, sûr de lui, Aramique Krauthamer, la trentaine et fraichement débarqué de New York il y a deux ans.

Sous les traits paisibles de « cet américain bien tranquille » comme l'aurait écrit Graham Green, se cache un artiste ambitieux, au fait des nouvelles technologies et de ses usages. Installé à Sofffa, l'espace de co-working situé 17 rue Sainte-Catherine dans le 1er, Aramique Krauthamer s'inscrit rapidement dans la vie numérique locale. À l'origine d'un premier Meetup qui vit se réunir des éléments clés des arts et pratiques numériques de la ville (le studio Théoriz, XLR Project, Flair, l'AADN ou encore Paradoxa et Crossed Lab), Aramique est rapidement identifié comme un acteur majeur en faveur du développement de ses nouvelles disciplines artistiques au sein desquelles l'informatique, la programmation et le réseau sont omniprésents.

Poète mais passionné de communication

Aramique Krauthamer n'a pas un bagage scientifique. Pas de passage par la Silicon Valley, même s'il en fréquente aujourd'hui des personnalités importantes, avec lesquelles il collabore régulièrement : « mon programme à l'université était centré autour de la poésie et de l'écriture performative. Initialement, je voulais devenir journaliste, scénariste ou poète. Quand j'ai terminé mes études, Facebook, YouTube et toutes ces nouvelles plateformes digitales étaient en pleine émergence. Cela m'a tout de suite passionné ». Les belles lettres, mais surtout la communication et la notion de réseau auront les faveurs du jeune homme dans les années 2000.

Les possibilités d'innovation et d'expérimentation en réseau sont ce qui l'intéresse en priorité. Il ne faudra pas longtemps à Aramique pour se lancer et créer ses propres installations. La poésie n'est pourtant pas absente du discours de cet artiste aussi pragmatique qu'imaginatif :

« Depuis quelques années, la réalité virtuelle est devenue le centre d'intérêt principal de beaucoup d'investisseurs, que ce soit dans le domaine de l'art, ou dans celui du divertissement. Les grandes entreprises investissent d'importantes sommes dans ce domaine. Je ne pense pas que nous savons vraiment où nous allons, mais pour moi, le plus intéressant est de créer des formes d'art qui permettent au public de participer d'une nouvelles manière. »

La réalité s'apprécie mieux « augmentée »

Installations, vidéos, œuvres génératives, clips musicaux, créations en réalité augmentée et réalité virtuelle, rien n'arrête le jeune artiste américain. Nommé à la tête de Tool en 2010 (société de production spécialisée dans le contenu interactif en direction de la publicité) aux États-Unis, et collaborateur du laboratoire Odd Division basé à Brooklyn, Aramique Krauthamer est rapidement reconnu pour son travail en tant qu'artiste numérique. 

À l'image d'un pays où la création ne peut se passer de fonds privés pour exister, ses activités artistiques s'inscrivent dans le cadre de collaborations avec des grandes firmes (Acer, Puma, Samsung) ou d'évènements emblématiques de la culture numérique : les conférences TED (Technology, Entertainment and Design) ou le Moogfest festival. 

« Je travaille sur les médias immersifs depuis des années. Mes premières installations étaient dédiées à l'immersion sur de grands formats. J'ai créé plusieurs projets en réalité augmentée, le dernier étant Conductar, pour le Moogfest en 2014. Il s'agissait d'une installation immersive qui couvrait entièrement la ville d'Asheville, le site du festival. L'application permettait de vivre la ville autrement, en générant de la musique et en visualisant des œuvres en réalité augmentée. J'ai aussi expérimenté avec la réalité virtuelle, en 2015, avec Huit Phases de L'Illumination, présenté au Palais de Tokyo à Paris ».

Un groupe de recherche sur la réalité virtuelle

« L'avenir est entièrement tourné vers une disparition de l'écart existant entre monde physique et numérique » déclarait, il y a peu, l'Américain en parlant de la réalité virtuelle. C'est au cours d'une conférence sur le sujet en mai dernier lors de l'European Lab, que le new-yorkais annonçait officiellement la naissance du Reality Research Lab. Façonné en collectif d'artistes et de studios lyonnais, ce laboratoire expérimental et artistique se tourne vers le développement de projets utilisant ces nouvelles formes de création faisant appel à la réalité virtuelle, mais aussi à la réalité augmentée et à la réalité mixte.

Le but étant de mettre en commun ressources techniques et théoriques, en collaborant. « À moyen terme, j'aimerais organiser des expositions plusieurs fois dans l'année, explique l'intéressé. Je pense que Lyon a assez de talents, d'artistes impliqués et de volontés, pour développer des projets importants et ambitieux. Le but étant de faire de Lyon un lieu similaire à Silicon Valley. »

 


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