Aides sociales : l'art et la manière de sortir du labyrinthe

Tel le mythe de Dédale, l'obtention d'aides sociales, pourtant parfois indispensables, est source d'inquiétudes. La complexité de sa législation est à elle seule la cause de renonciation d'une demande, par méconnaissance ou par dépit.


Sous le terme générique « d'aides sociales », il existe en réalité celles visées par l'article L 111-1 du Code de l'action sociale et des familles, aux termes duquel « toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales d'attribution, des formes de l'aide sociale telles qu'elles sont définies par le présent Code. »,  et celles attribuées plus spécifiquement aux personnes âgées et aux personnes handicapées.

Sous conditions, le remboursement des aides sociales peut avoir lieu du vivant du bénéficiaire lorsqu'il revient à meilleure fortune (on parle alors de « recours ») ou lors de sa succession (dans ce cas, on parle de « récupération »). Cet article exhaustif a pour vocation de présenter les principaux types d'aides sociales et leur caractère récupérable… ou non, afin de rassurer, avant tout, ses lecteurs. Suivez le fil d'Ariane…

Quelles aides sociales sont récupérables ?

Pour qu'un demandeur soit admis au bénéfice de l'aide sociale, deux conditions sont nécessaires : une insuffisance de ressources et l'insuffisance de couverture des besoins par la mise en jeu de l'obligation alimentaire qui est un droit d'ordre public. Rappelons également que les décisions d'admission à l'aide sociale ne sont jamais définitives. Elles peuvent faire l'objet de révision, notamment si elle est perçue indûment ou par fraude ou en raison de la modification de la situation économique du bénéficiaire.

Mais un principe majeur est révélateur de la législation de l'aide sociale en France : celui de la subsidiarité. La société n'aidera les plus fragiles qu'uniquement une fois que ceux-ci auront eu recours à toutes les ressources susceptibles d'être obtenues. Pour mieux comprendre, voir le tableau récapitulatif des aides sociales ci-après.

À quel moment a lieu la récupération ?

Lorsqu'une aide est sollicitée, il est donc important de se poser la question : devra-t-elle faire l'objet d'un remboursement ? En effet, l'État est effectivement en droit de récupérer sur la succession du bénéficiaire les aides sociales qu'il a pu verser du vivant de celui-ci. Auquel cas, elles présentent alors un caractère d'avance et constitueront une créance au moment de l'ouverture de la succession du bénéficiaire. Ses héritiers en devront donc le remboursement, mais seulement par prélèvement sur l'actif de la succession. Par « actif de la succession », on entend l'actif net, c'est-à-dire la valeur de l'ensemble des biens diminuée des dettes.

Les dettes déductibles sont les dettes personnelles du défunt, les dettes nées à l'occasion du décès (par exemple les frais funéraires) ou encore les dettes attachées aux biens composant la succession (un prêt en cours, par exemple). En cas de présence d'un testament, il faudra distinguer :

– Le légataire universel ou le légataire à titre universel reçoit la totalité de la succession ou une certaine quote-part de ces biens (par exemple, la moitié de la succession). Il est assimilé à un héritier et est tenu de payer les dettes de la succession. En conséquence, les règles de récupération à l'encontre du légataire universel ou du légataire à titre universel sont les mêmes que celles concernant la récupération sur succession.

– Le légataire particulier est celui qui reçoit un bien déterminé (par exemple une voiture, un terrain,  etc.). Il n'est pas tenu de payer les dettes de la succession. Le recours à son encontre est exercé jusqu'à concurrence de la valeur du ou des biens légués au jour de l'ouverture de la succession.

À titre subsidiaire, la récupération pourra avoir lieu contre le ou les bénéficiaire(s) d'un contrat d'assurance-vie souscrit par le défunt, à concurrence de la fraction des primes versées après l'âge de 70 ans et au prorata des sommes versées à chacun d'entre eux.

Et si le montant des aides sociales est colossal ?

Aussi, lorsqu'une succession s'ouvre, est-il du devoir du notaire de rechercher l'existence des aides sociales et de procéder à une analyse détaillée. Notamment, son rôle est essentiel pour le calcul du concours de récupération entre elles quand la personne décédée avait bénéficié d'aides de natures différentes. Voici deux exemples pour mieux comprendre.

1er exemple : celui de M. Primus, décédé et laissant pour héritiers trois enfants. Sa succession s'élève à 70 000 €. Deux demandes de remboursement ont été émises : l'une par la MSA, pour 52 000 €, au titre de l'ASPA ; l'autre par le Département, pour 33 000 €, au titre de l'aide sociale à domicile, soit un total bien supérieur à la succession…

33 000 € de remboursement de l'aide sociale à domicile + 6 000 euros versés aux héritiers + 31 000 € de remboursement de l'ASPA de l'aide sociale (surplus non payé !) = 70 000 €

2e exemple : celui de M. Secondus, décédé et laissant pour héritiers trois enfants. Sa succession s'élève à 70 000 €. Deux demandes de remboursement ont été émises : l'une par la MSA, pour 52 000 €, au titre de l'ASPA ; l'autre par le Département, pour 33 000 €, au titre de l'aide à domicile, soit un total toujours supérieur à la succession…

39 000 € versés aux héritiers + 7 000 euros de remboursement de l'Aspa (surplus non payé !) + 24 000 euros répartis entre Aspa (13 846 €) et aide à domicile (10 154 €) (surplus non payé !) = 70 000 €

Ces deux exemples permettent de comprendre que le montant maximum susceptible d'être récupéré est représenté par l'actif net de succession. Dès lors, même si la créance est plus élevée, le remboursement sera plafonné au montant de l'actif net recueilli.

Vous l'aurez donc compris, jamais les héritiers ne sont tenus à titre personnel et ne pourront être poursuivis sur leurs biens personnels. Le rôle du notaire est donc avant tout de préciser à ses clients qu'accepter une succession ne leur fait courir aucun risque à ce titre. Au pire, ils ne percevront rien…


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