Micaela aime Don José qui aime Carmen qui aime le toréador lui-même aimé (enfin, peut-être !) par le taureau... La compagnie de théâtre d'objets Turak récidive dans le registre décalé et poétique. Leur dernière création, vue dernièrement aux Célestins, s'inspire très ouvertement de l'opéra en 4 actes de Bizet, Carmen. La troupe menée par Michel Laubu fait de l'œuvre du compositeur français et de l'histoire de Mérimée leur terrain de jeu follement loufoque. Sous leur lorgnette, le drame amoureux andalou devient une légende vaguement bretonne et terriblement Turaque. La fable se déroule au pied d'un phare breton, Ar-Men, originellement situé au large de l'île de Sein, ici en Turakie, pays imaginaire pensé il y a 30 ans par Michel Laubu. Pour le metteur en scène, comédien et manipulateur, « le théâtre d'objet réinvente l'archéologie. On récupère, on collecte des objets usés dont plus personne ne veut pour les transformer. Nous jouons à faire de même avec ces grands airs en organisant un collectage de ces musiques et images qui traînent dans notre mémoire collective. Carmen devient alors un extraordinaire chantier de fouilles imaginaires, un terrain de jeu d'images visuelles et sonores... » L'opéra, l'un des plus joués au monde, voit sa musique adaptée par Laurent Vichard et interprétée par des musiciens hippocampes, moules, crabes projetés sur grand écran depuis leur fosse marine. Présents sur le plateau, cArMen aux cheveux en vinyle et en robe de toile de tente a un "je-ne-sais-quoi" de Maria Callas. Les autres protagonistes valent aussi pour leur look, notamment le taureau à l'aura très féminine. La magie opère, plongeant les spectateurs, qui ne dissimulent pas leur plaisir, dans cette adaptation turaque de Carmen. FB
Une cArMen en Turakie, du 28 au 31 janvier à la Comédie de Saint-Étienne