À voir en salles le 10 mai 2023

À voir en salles le 10 mai 2023

À voir

★★★☆☆ La Fille d'Albino Rodrigue 

Rosemary, 16 ans, vit placée. De retour chez ses parents, elle s'étonne que son père, Albino Rodrigue, ne vienne pas l'attendre à la gare. Puis qu'il ne réponde pas au téléphone. Et s'inquiète franchement quand sa mère, inconséquente comme toujours, multiplie les mensonges à son propos. Que s'est-il passé ?

Histoire étrange et dérangeante, d'autant plus qu'elle se nourrit de faits existants, La Fille d'Albino Rodrigue sait comment cultiver le malaise en créant une atmosphère d'anormalité, de décalage permanent défiant la logique. Qu'une fille semble une pièce rapportée dans sa propre famille, que sa mère la traite en vague nièce, que leur maison soit l'antichambre d'un vide-grenier impersonnel — ils font dans la brocante — et que les dissimulations manifestes ou les entorses à la vérité qui s'accumulent finissent par transformer la bizarrerie en inquiétude latente : jusqu'où la toxicité maternelle est-elle capable d'aller ? Le suspense térébrant que Christine Dory compose doit énormément à l'interprétaiton d'Émilie Dequenne (et à l'absence obsédante de celui qui joue son époux, Philippe Duquesne). Détail piquant : son personnage pourrait être une évolution défavorable de Rosetta (1999) — sur le fil en permanence, dans son combat individualiste pour s'en sortir —, voire de celui qu'elle campait dans Mariées mais pas trop (2003) de Catherine Corsini, où elle s'initiait à l'art de la mythomanie compulsive. On était alors dans une comédie noire ; il n'y a rien qui prête à sourire dans ce drame.

De Christine Dory (Fr., 1h30) avec Emilie Dequenne, Galatea Bellugi, Philippe Duquesne...

 


 ★★★☆☆ Le Principal

Guère apprécié par les profs du collège où il exerce, l'austère Sabri Lahlali place sa mission de principal-adjoint et l'exemplarité au-dessus de tout. Craignant que son fils, pourtant excellent élève, rate le brevet et ne compromette son dossier, Sabri commet le pire en l'aidant à tricher. À lui la spirale du mensonge...

Quittant pour la première fois au cinéma le registre autobiographique (même s'il place ici ou là des éléments personnels, notamment dans la relation avec le frère borderline de Sabri), Chad Chenouga marque un peu le pas. En cause *principalement*, une histoire en théorie authentique dont le dénouement invraisemblable, digne d'un mauvais téléfilm, rend compte des dysfonctionnements profonds de l'institution éducative — surtout dans ses hautes sphères. Il y avait pourtant des enjeux intéressants dans la situation de Sabri, transfuge de classe dont on devine l'inconfort social permanent, matérialisé par la roideur (naturelle mais ici accentuée) de Roschdy Zem. Mais davantage que le délit paternel et ses conséquences morales dignes du cinéma roumain de Mungiu ou Porumboiu, c'est le lien ambigu entre le principal-adjoint et sa patronne effacée incarnée par Yolande Moreau, un peu éprise de lui, que l'on retiendra, Chenouga s'avérant plus subtil dans l'évocation des frustrations et des non-dits.

De Chad Chenouga (Fr., 1h22) avec Roschdy Zem, Yolande Moreau, Marina Hands...


★★★☆☆Le Paradis 

Un centre pour mineurs délinquants en Belgique. Alors qu'il est sur le point d'en sortir, Joe flirte avec les embrouilles à coups de bagarres et de fugues. Quand William débarque, Joe se sent immédiatement attiré par ce garçon plus sauvage que les autres. Une liaison se noue en marge du groupe...

Bouillonnement d'hormones, promiscuité, réclusion (OK, ça ressemble un peu au « cloître, caverne, prison, monastère » de Midnight Express), la relation entre les deux adolescents est tout de même cousue de fil blanc, avec ce qu'elle suppose de violence passionnée, d'attraction et de répulsion. Zeno Graton filme le cadre du foyer et ses activités manuelles ou éducatives, filme l'histoire d'amour clandestine (qui ne souffre pas de manifestation d'hostilité homophobe), filme la nature... Ce n'est pas déplaisant ni laid, mais ce sont des cases qui se succèdent à l'écran et qui auraient pu se contenter d'un réceptacle format court.

De Zeno Graton (Bel.-Fr, , 1h23) avec Khalil Gharbia, Julien De Saint-Jean, Amine Hamidou...


★★★☆☆ La Révole nature, de la vigne au verre 

Loin des quilles standardisées gavées de sulfites, pesticides et autres intrants issus de l'agro-pétrochimie, le mouvement du vin nature fait avec du seul raisin a conquis une place enviable dans le paysage hexagonal. Caviste parisienne, Aline Geller part à la rencontre des acteurs de cette “révole“-ution...

Nom donné à la fête de fin de vendanges, la révole n'est qu'une parmi les nombreuses célébrations (libations ?) accompagnant le monde du vin, elle figure ici de manière marginale dans ce qui s'apparente à un long reportage — ou à l'ébauche d'une série, à l'instar de Mondovino de Nossiter ? — un peu foutraque mais instructif. Où l'on mesure l'engagement environnemental et qualitatif des producteurs ayant investi depuis la fin du XXe siècle dans le vin nature, leur caractère folklorique parfois, leurs méthodes à l'ancienne (l'usage de l'amphore enterrée, par exemple), leur apostolat souvent ; leur conscience d'une nécessaire réduction de la quantité au profit de la qualité. Faisant le choix de s'ouvrir en révélant le poids économique du vin nature (via le salon La Dive Bouteille de Saumur), le documentaire de se clôt sur un constat ironique : le fait que les viticulteurs français, si vertueux dans leur consommation quotidienne d'énergies fossiles, exportent l'écrasante majorité de leur production à l'autre bout du monde. Avec le vin, on n'est jamais à un french paradox près.

Documentaire de Aline Geller (Fr., 1h33)

à lire aussi

vous serez sans doute intéressé par...

Mardi 31 octobre 2023 Édition raccourcie mais augmentée pour le festival Face à Face, dont l’objectif reste la visibilisation de la culture LGBTQIA+ et la lutte contre les LGBTQIAphobies. Tour d’horizon de cette 19e.
Mardi 9 mai 2023 Itinéraire parallèle de deux jeunes membres de la tribu des Oglalas Lakotas tentant d’échapper à la marginalité, War Pony de Gina Gammell & Riley Keough a conquis les jurés de la Caméra d’Or l’an passé. Alors que se profile le nouveau Festival...
Mardi 4 janvier 2022 Dans l'une de ces rues que les couvre-feux plongeaient dans la pénombre, on refait la fête. On y mange aussi désormais thaïlandais, grâce à Chan. Nous sommes (...)
Mardi 23 décembre 2014 Ridley Scott réussit là où Darren Aronofsky avait échoué avec Noé : livrer un blockbuster biblique où la bondieuserie est remplacée par un regard agnostique et où le spectacle tient avant tout dans une forme de sidération visuelle. Christophe Chabert
Mardi 23 décembre 2014 Le Top 2014 du PB 1. Nymphomaniac de Lars Von Trier 2. Winter Sleep de Nuri Bilge Ceylan 3. The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson 4. Adieu au (...)
Lundi 6 octobre 2014 En 70 minutes, avec sa seule petite caméra, quelques objets et quelques visages, Alain Cavalier raconte les grandes fictions qui ont marqué son enfance : les Évangiles et l’Odyssée d’Homère. Un film sublime, à la fois simple et cosmique, sur la vie,...
Mercredi 3 septembre 2014 Moins flamboyante que l’an dernier, la rentrée cinéma 2014 demandera aux spectateurs de sortir des sentiers battus pour aller découvrir des films audacieux et une nouvelle génération de cinéastes prometteurs. Christophe Chabert

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X