Zobi la mouche is not dead

 Zobi la mouche is not dead

Interview / Reformées en 2018 pour fêter les 30 ans de leur premier album, les Négresses Vertes sont encore sur la route cinq plus tard, ravivant l'esprit de l'âge d'or d'une certaine scène rock alternative française. Un come-back flamboyant que nous évoquons avec Stéphane Mellino, guitariste et chanteur du groupe, à quelques semaines du passage du groupe sur le festival La Rue des Artistes.

Après dix-sept années de silence radio, la nouvelle tournée semble ne plus pouvoir s'arrêter. Avez-vous été dépassés par les événements ?

« Complètement ! En 2018 nous avions calé une quarantaine de dates pour célébrer l'album Mlah que l'on avait sorti en 1988. On n'a pas vraiment tiré de plan sur la comète, on ne savait à quoi s'attendre, ça partait juste d'un bon sentiment, se faire le cadeau de rejouer ensemble pour ne pas oublier ce qui nous lie car on a tous pris des chemins différents depuis la séparation du groupe. Mais il s'est passé quelque chose de magique, le bouche à oreille, la nostalgie d'une époque.

On voit bien que nos spectateurs sont souvent les enfants de ceux qui nous écoutaient à nos débuts. Ils viennent tous en famille... Du coup on a repris la route ensemble comme au premier jour, ou presque. On va bientôt faire la 300e date, c'est fou ! »

À quoi l'esprit du groupe tient-il encore aujourd'hui ?

« Le ciment du groupe reste le live, car c'est sur scène que nos chansons puisent leur énergie auprès du public, c'est là qu'elles prennent tout leur sens. Nos tubes nous poussent à continuer l'aventure. Dès que l'on a commencé à répéter il y a cinq ans, on a immédiatement senti que tout se réveillait, se réanimait, pas besoin de tergiverser ! On a tellement joué ces chansons que les automatismes sont restés, sans doute parce qu'elles se rappellent à la meilleure partie de nous-mêmes. En concert quand on joue Voilà l'été, Zobi la mouche ou Sous le soleil de Bodega, le public explose, c'est vraiment incroyable. Et ce ne sont pas des chansons que l'on peut faire semblant de jouer, il faut y aller à fond.

A l'époque on a vécu tout ça comme un feu incandescent, plusieurs d'entre nous s'y sont d'ailleurs brûlés. Aujourd'hui, à soixante barreaux, on apprécie ce qui nous arrive avec davantage de recul, on prend ce qu'il y a à prendre, on savoure ce partage avec le public qui nous donne la patate alors qu'on est quand même un peu les George Clooney du rock'n'roll ! Pour nous c'est un peu une machine à remonter le temps. »

La composition du groupe a-t-elle évolué ?

« Si le répertoire n'a pas bougé, bien entendu l'équipe s'est renouvelée avec l'arrivée de nouveaux musiciens qui pour certains n'étaient pas bien vieux quand nos albums sont sortis. Matthieu Rabaté nous a rejoints à la batterie. Il a un background de fou puisqu'il a accompagné un nombre incalculable d'artistes, de Zazie à Indochine. Je pense qu'il apprécie d'être sur les routes avec nous, dans une vraie histoire de groupe où il a son mot à dire comme chacun des membres. À l'accordéon, Cizzko a remplacé Matias Canavese. C'est un ancien musicien du groupe Elzef dont j'avais produit l'album Le vent se lève en 2007. Matthieu et Cizzko apportent une certaine fraîcheur au groupe, une nouvelle énergie. »

Le propos des chansons a-t-il vieilli avec le temps ?

« Non, je pense au contraire que nos textes sont toujours d'actualité. On perpétue encore cette vision presque paradoxale qu'Helno avait à l'époque (fondateur et premier chanteur du groupe, décédé en 1993, NDLR), quand il abordait le côté sombre des choses mais d'une manière festive. On a même la chance de dire dans nos chansons des choses qui seraient peut-être difficiles à produire aujourd'hui. Si on cultive le sens de la fête et du partage, certains de nos textes sont engagées et explicites, ce n'est pas Petit Papa Noël, mais comme ils sont gravés dans le marbre, on peut les chanter sans craindre de finir au pilori !

De toute façon, nos chansons nous ont largement dépassés, elles appartiennent maintenant à tout le monde. Mais avant tout, on ne veut pas se prendre la tête, ce que l'on souhaite c'est faire du bien aux gens, on veut que le temps d'un concert tu oublies que tu as mal quelque part ou que tu n'as plus grand chose sur ton compte en banque. »

C'est peut-être cette générosité-là qui fidélise votre public ?

« Certainement. Les temps sont difficiles, on a tous besoin de trouver quelque chose de positif pour se vider la tête. Et puis sur scène les gens voient que l'on joue en vrai, qu'on donne sincèrement de notre personne. On a vu dans des festivals des têtes d'affiche qui branchent une clé USB et puis qui remuent les mains, devant un public qui se regarde sur son smartphone pendant le concert. Je suis désolé, mais la musique c'est pas ça.

On le sait, nous on vient d'une toute autre époque, on fait notre maximum à chaque fois. On vient de faire une pause de cinq mois pour recharger les batteries, on en avait besoin. Puis on repart pour au moins une trentaine de dates jusqu'en novembre. Après, c'est advienne que pourra, tant qu'on nous programme on y va, on se régale. Si le public est toujours là, nous aussi. »

Les Négresses Vertes, le dimanche 18 juin, parc Nelson Mandela à Saint-Chamond, dans le cadre du festival La Rue des Artistes ; entrée libre.

 

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