Voici tout juste un demi-siècle que la célèbre " retraite " bénédictine de La Chaise-Dieu, picotée par le zéphyr du septentrion, enivre esthètes et mélomanes. Pas du tout l'âge de la retraite...
Une édition 2016 en forme de pèlerinage, pour ce doyen des festivals, toujours rafraîchissant, ne serait-ce que par sa météo. Reconstitution historique du premier concert donné par Gyorgy Cziffra en 1966, Pascal Amoyel, son disciple, reprend le tabouret du maître, et diffuse son philtre pianistique à l'Orchestre National d'Île-de-France. La suite du programme donne le vertige. Cette année encore, on ne saura où donner de l'oreille : Hervé Niquet et Le Concert Spirituel, les sœurs Labèque, La Grande Écurie et La Chambre du Roy et J.-C. Malgoire, L'Orchestre National de Lorraine, Vaclav Luks et le Collegium vocale 1704, le Concert de la Loge (toujours dans une forme " olympique ", malgré l'inculte lobby, fossoyeur de l'idéal de paix portant son nom), l'Ensemble Pygmalion et Raphaël Pichon, toujours aussi magiques, l'Ensemble Clément Janequin, Renaud Capuçon, Vincent Larderet, le Gabrieli Consort et Paul McCreesh, Canticum Novum, sans oublier le trublion Sébastien Daucé et son ensemble Correspondances, l'Orchestre National de Lyon, le Banquet Céleste du pléonastique Damien Guillon, Raphaël Sévère et le Quatuor Prazak, le Berliner Symphoniker, Alexander Ghindin, la Maîtrise de la Cathédrale du Puy, l'O.S.E. et Daniel Kawka... Quel trombinoscope !
Câlin jubé, austère mais superbe...
Corne d'abondance en terre d'ascèse, le choix du festivalier devient « cornélien ». Se pardonnerait-il d'être absent au grand concert symphonique d'ouverture, d'être allé cueillir des mûres pendant le Banquet Céleste pavé des angoissants chromatismes du Nisi Dominus de Vivaldi ? Pourrait-on encore se dire mélomane en ayant loupé la "Correspondances" avec Sébastien Daucé, génial claveciniste et organiste, mais aussi fin limier en recrutement instrumental et vocal ? Se pardonnerait-on de poser un lapin à l'ensemble Pygmalion revisitant Monteverdi ainsi qu'à la géniale intuition esthétique d'un Raphaël Pichon ? Serait-il bien convenable d'être absent aux Vêpres de Philippe Hersant, rare compositeur français sachant encore écrire de belles musiques tonales? Enfin, et puisque notre format n'autorise qu'un nombre limité de coups de projecteur, comment ne pas renouveler nos vœux avec le Quintette pour Clarinette en la majeur de Mozart, qui grâce à Raphaël Sévère et le Quatuor Prazak atteindra la voûte céleste, son berceau d'origine ?
Festival de La Chaise-Dieu, du 18 au 28 août 2016