De Audrey Diwan (Fr. 1h35) avec Pio Marmai, Céline Sallette, Carole Franck...
Dentiste apprécié, mari et papa aimant, Roman cache sa cocaïnomanie. L'une de ses fillettes étant victime d'une surdose, la police et les services sociaux débarquent : la famille entière se révélant positive à la drogue, Les enfants sont placés. Et l'image du bonheur parfait se pulvérise...
Audrey Diwan a tiré son argument d'une histoire vraie en modifiant, comme le veut la coutume, les noms et situations des protagonistes afin qu'ils ne soient pas identifiables. De ce fait divers à énigme qui aurait pu ne tenir qu'un court métrage — en clair, comment ont-ils tous pu être contaminés par le père ; ce dernier les a-t-il délibérément empoisonnés ? —, la cinéaste a su étoffer son propos en composant un film où l'addiction prend des significations supplémentaires et se transforme en bombe à fragmentation.
S'ouvrant sur la dépendance aux stupéfiants, le drame bifurque en effet vers un récit centré autour du manque : celui éprouvé par des parents privés de leur progéniture, et puis surtout celui que les deux amants Roman et Camille officiellement séparés ressentent l'un pour l'autre et qu'ils vont s'employer à compenser en douce dans des chambres d'hôtels borgnes, tels deux camés cherchant honteusement leur dose — un besoin physique plus admissible que la dope, mais tout aussi proscrit par le regard moralisateur des proches.
Cette question du regard donne par ailleurs l'occasion à la cinéaste d'effectuer un très intéressant travail sur la manière dont on considère l'autre “après“ que la confiance a été entamée : un plan en apparence anodin peut revêtir un double-sens épouvantablement glaçant. Pour le personnage de Camille, passer de l'aveuglement à la surinterprétation de chaque geste de Roman équivaut bien à basculer dans une forme de folie.