Théâtre / Quand l'un des plus grands metteurs en scène français (Jean-François Sivadier) remonte l'un des ses spectacles phares ("La Vie de Galilée" de Brecht) toujours avec son comédien fétiche (Nicolas Bouchaud), on ne peut que s'enthousiasmer. Ce que l'on fait ici du coup.
Nicolas Bouchaud–Jean-François Sivadier, c'est la quintessence du rapport comédien–metteur en scène. Une Rolls Royce théâtrale. Le talent du premier, véritable bête de scène capable de donner vie à n'importe quel matériau, couplé au savoir-faire du second, faiseur de théâtre au sens noble du terme, offre à chaque fois des étincelles.
Ensemble, ils se sont penchés sur Feydeau, Molière, Shakespeare, Büchner ou encore Brecht : des dramaturges qui ont écrit de véritables machines à jouer où le plaisir des comédiens et – surtout – du public est constant. Si tant est que les artisans d'aujourd'hui les prennent telles quelles, en assumant cette partie de jeu (qui peut aussi côtoyer des propos plus graves), ces œuvres du répertoire sont des petits bijoux indémodables.
Science politique
C'est l'une de ses machines que Jean-François Sivadier a décidé de remonter, après une première version à succès en 2002 : La Vie de Galilée de Bertolt Brecht. Soit le parcours de l'un des plus grands scientifiques de l'histoire qui s'est confronté à un pouvoir religieux bien décidé à conserver l'ordre établi – la terre au centre de l'univers, et pas l'inverse. Une pièce que l'auteur allemand a conçue entre 1938 et 1939, alors qu'il était en exil dans le Nord de l'Europe, d'où le miroir possible entre Galilée et lui – si, dans le texte, « on remplace le mot science par le mot théâtre, cela devient vertigineux » explique Jean-François Sivadier.
Une pièce finalement plus politique que scientifique ou historique : Sivadier place logiquement les individus (une trentaine de rôles pour huit comédiens), leurs combats, leurs aspirations et leurs renoncements, au centre de sa création, en donnant le rôle-titre à un Nicolas Bouchaud exceptionnel en Galilée – son jeu et sa présence magnétiques sont toujours présents dans nos souvenirs, malgré la dizaine d'années écoulées.
« Penser est l'un des plus grands divertissements de l'espèce humaine » assurait Galilée : une citation que Sivadier fait sienne avec brio. Les artistes montent souvent des spectacles à un rythme effréné, enchaînant les nouveautés. Revenir sur une mise en scène phare qui a marqué nombre de spectateurs est une idée toute simple mais, pour le coup, diablement pertinente.
La Vie de Galilée, jusqu'au samedi 10 janvier, à la MC2