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Portrait / Zak Laughed, musicien. Du haut de ses 15 ans, ce fer de lance d’une scène clermontoise qui rêve d’Amérique, fait sensation avec son album, «The Last Memories Of My Old House». Il vient le défendre sur la scène de l’Epicerie Moderne. Comme un grand. Stéphane Duchêne
Époque oblige, au lieu de vagabonder avec lui sur les routes ou dans les trains de marchandises – Dylan Style –, ses chansons se baladent sur le net. L’effet de sidération provoqué par l’anachronisme de ce petit bout d’homme reprenant d’une voix perchée les ancêtres Johnny Cash et Nick Drake fait le reste. Plus encore lorsqu’il remporte un concours de reprises, organisé par le légendaire label british Rough Trade, avec une version tout en arpège et en légèreté non muée de «The End Has No End», fameuse scie des Strokes enregistrée deux jours avant la date limite : «je n’y croyais pas trop, j’avais écouté les reprises de pas mal de candidats et je les trouvais bien meilleures». C’est pourtant la sienne qui sort en 45 tours vinyle chez Rough Trade, «ce qui est quand même la classe», admet-il. Pour autant, Zak ne se contente pas de s’approprier les chansons des autres. Il compose les siennes depuis que Matthias Malzieu de Dionysos l’y a incité : «C’est grâce à Dionysos que je fais de la musique, ce sont eux qui m’ont fait découvrir l’ukulélé avec l’album «Monsters in Love». J’ai pu les rencontrer par l’intermédiaire de mon père qui a travaillé avec eux sur une résidence et Matthias m’a poussé à écrire, il m’a donné confiance en moi». Fort de sa petite notoriété d’enfant prodige, créneau logiquement en vogue dans la «musique de jeunes», Zak range ses jouets sur son premier album au titre un peu antique, «The Last Memories Of My Old House». Au menu : jolies ballades frissonnantes, comme «22 & 66» ou «People Are Sick in the Rain», payant leurs tributs à leurs aînés et notamment au groupe Eels, qu’il adore, et tubes désarmants comme «Each Day». Le genre de sucrerie qui accompagne les réveils difficiles ou les trajets un peu longs, avec sa mélodie facile et sa rythmique catchy dévergondée par un orgue mal embouché. Bête de foire
Le succès critique est total, sans qu’on sache trop s’il est dû au talent, indéniable, de l’artiste ou à son jeune âge. À cette manie qu’on a de crier au génie dès qu’un bambin présente un cendrier en coquillettes. Ce côté bête de foire, Zacharie s’en accommode, un peu las : «Si on parle plus de moi à cause de mon âge que de ma musique, c’est à moi d’inverser la tendance en faisant de bonnes chansons et de bons concerts. Mais si c’est un argument pour les journalistes d’être jeune et de Clermont, tant mieux». Tout cela ne l’empêche de toute façon pas de relativiser sa réussite : «Je ne considère pas cette exposition médiatique comme un succès. J’ai eu de bons papiers, mais je ne pense pas que mon disque se vende beaucoup. Ça ne m’aurait pas dérangé de faire dix ans de bars pourris et de disques enregistrés dans ma chambre et si tout s’arrête, moi je continuerai». The end has no end, donc. En attendant, le jeune Zak, qui jongle entre lycée et obligations «professionnelles» («je dois bien ça à mon label»), donnant ses interviews le jour des enfants, est déjà attelé à son prochain disque. Il l’annonce très différent : «on va se rockifier, avec un mélange de bruit, de mélodies et de country. Jouer avec un groupe me permet de me rapprocher d’autres influences comme The Jesus & Mary Chain ou The Feelies. Je n’ai pas encore l’idée du son global, mais je suis à la recherche de quelque chose de spontané». Et pour ce que ça vaut, entre deux cours et entres deux chansons, l’élève de 1ère L rêve de collaborations prestigieuses avec Jack White, Jeffrey Lewis et surtout M. Ward : «je l’admire beaucoup car il a su mélanger toutes les musiques américaines pour en faire un truc à lui». Soit pile l’eldorado poursuivi par une poignée de jeunes Clermontois qui veulent l’Amérique, et qui l’auront.Zak Laughed
À l’Epicerie Moderne (1ère partie d’Emily Jane White), samedi 6 février.
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