"L'Apparition" : En présence d'un doute

de Xavier Giannoli (Fr., 2h21) avec Vincent Lindon, Galatea Bellugi, Patrick d'Assumçao...

Encore blessé et traumatisé par la mort d'un confrère sur le terrain, un reporter de guerre accepte de sortir de sa prostration quand un évêque du Vatican lui demande de participer à une enquête canonique : une jeune fille prétend que la Vierge lui est apparue, mais rien n'est moins sûr...

Xavier Giannoli traite ici, comme dans nombre de ses réalisations précédentes — ses courts métrages y compris —, d'une fascination pour une forme d'aura inexplicable ; la grâce mystique prenant dans L'Apparition le relai de la notoriété (Superstar), du charisme (Quand j'étais chanteur) ou du (non-)talent artistique (Marguerite). À cette note fondamentale, il ajoute un autre thème récurrent et souvent complémentaire : la dissimulation et l'usurpation de qualité. Pour les figures centrales de ses films, l'inadéquation entre l'image que celles-ci renvoient et la vérité fabrique le récit, à travers un conflit moral ou la construction d'une “réalité alternative”— pour reprendre un terme à la mode. Et, chose étonnante, le mensonge de l'imposture passe aussi bien par la parole que par la réserve : il est une maladie se propageant auprès de victimes consentantes, en demande d'être dupées.

Habitué aux rôles intenses exigeant qu'il se dissolve complètement dans son personnage, Vincent Lindon est l'interprète idéal de cette quête/enquête : il semble comme possédé par une douloureuse faim inassouvie, dans l'attente d'une réponse indicible. En l'appelant ici, Giannoli procède comme l'évêque convoquant le journaliste : il a pressenti que ses interrogations intimes et surtout son absolue sincérité contribueront au succès de la mission. Toutefois, il aurait aussi dû prévoir que Lindon cannibaliserait le film : difficile d'exister face à un acteur d'une telle tension.

à lire aussi

vous serez sans doute intéressé par...

Mardi 6 février 2018 Après Marguerite, Xavier Giannoli revient avec L’Apparition. Vincent Lindon y campe un journaliste envoyé par le Vatican dans les Alpes, où une jeune fille affirme avoir eu une apparition de la Vierge. L’enquête est ouverte… Propos recueillis par...
Jeudi 15 juillet 2021 Une carrosserie parfaitement lustrée et polie, un moteur qui rugit mais atteint trop vite sa vitesse de croisière pépère… En apparence du même métal que son premier et précédent long métrage,  Grave, le nouveau film de Julia Ducourneau semble...
Mercredi 16 mai 2018 « Celui qui combat peut perdre. Celui qui ne combat pas a déjà perdu » Citant Brecht en préambule, et dans la foulée de La Loi du marché Stéphane Brizé et Vincent Lindon s’enfoncent plus profondément dans l’horreur économique avec ce magistral récit...
Mercredi 4 avril 2018 Wes Anderson renoue avec le stop motion pour une fable extrême-orientale contemporaine de son cru, où il se diversifie en intégrant de nouveaux référentiels, sans renoncer à son originalité stylistique ni à sa singularité visuelle. Ces Chiens...
Mardi 30 mai 2017 Pour commémorer le centenaire de sa disparition, Jacques Doillon statufie Auguste Rodin dans ses œuvres. L’incandescence contenue de Vincent Lindon et le feu d’Izïa Higelin tempèrent heureusement une mise en scène par trop classique.
Mardi 19 janvier 2016 S’inspirant de l’affaire de l’Arche de Zoé, Joachim Lafosse confie à un Vincent Lindon vibrant un rôle d’humanitaire exalté prêt à tout pour exfiltrer des orphelins africains. L’année 2016 pourrait bien être aussi faste que la précédente pour le...
Mercredi 27 mai 2015 Comment un chômeur de longue durée se retrouve vigile et fait l’expérience d’une nouvelle forme d’aliénation par le travail : un pamphlet de Stéphane Brizé, radical dans son dispositif comme dans son propos, avec un fabuleux Vincent Lindon. Critique...
Mercredi 27 mai 2015 Le Méliès réussit un nouveau joli coup dans sa programmation de séances de cinéma suivies ou précédées par des rencontres en visio-conférence avec des réalisateurs ou (...)
Mardi 31 mars 2015 Même si elle traduit un certain regain de forme de la part de Benoît Jacquot, cette nouvelle version du roman d’Octave Mirbeau a du mal à tenir ses promesses initiales, à l’inverse d’une Léa Seydoux épatante de bout en bout. Christophe Chabert

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X