CLINT EASTWOOD
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On ne s'explique toujours pas pourquoi le sublime diptyque de Clint Eastwood sur la bataille d'Iwo Jima n'a pas suscité l'engouement planétaire de Million dollar baby... Le DVD est l'occasion de réparer cette injustice, notamment vis-à-vis du volet «américain» qui a gagné en pertinence depuis la sortie de Lettres d'Iwo Jima, son pendant japonais. Car si le projet global d'Eastwood est d'interroger les rapports entre nationalisme, patriotisme et propagande, le culot insensé de Mémoires de nos pères est d'en donner une lecture unilatéralement critique. La construction, éclatée, faite de constants allers-retours entre le champ de bataille, le retour aux pays des trois «héros» récupérés par l'État puis instrumentalisés pour récupérer des fonds et le souvenir contemporain de cette période trouble, établit la subtile dialectique du film : dans une guerre, est-ce les soldats qui servent leur pays ou le pays qui se sert de ses soldats ? L'héroïsme est-elle une valeur intime, ou n'est-elle qu'un label décerné par la nation pour ses propres desseins ? Enfin, vieille rengaine soudain rendue à sa pertinence initiale : est-ce l'actualité qui fait les media ou les media qui font l'actualité ? Sachant que le vieux sage Eastwood apporte des réponses toujours plus complexes à ces questions, mettant en œuvre tout son savoir-faire de cinéaste classique pour éviter le manichéisme, on mesure largement l'ambition et la réussite d'une œuvre exceptionnelle, formellement éblouissante et philosophiquement impressionnante.CC
