Prévention des difficultés : dirigeant de sociétés, il existe la conciliation !

par Arnaud Bolusset / Des mesures légales sont à prendre lorsqu’une société éprouve une difficulté juridique, économique, financière ou patrimoniale avérée ou prévisible, mais sans être encore en cessation des paiements depuis plus de 45 jours.

La période économique dans laquelle nous nous trouvons impacte les activités de nombre d’entreprises et il ne sera abordé dans cet article que le cas des personnes morales, puisque la situation de l’entrepreneur individuel obéit à des règles spécifiques en matière de procédures collectives depuis la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité indépendante.

Après un ralentissement général de l’économie, en lien avec l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat des ménages, le dirigeant de société doit anticiper sur une situation de crise pressentie pour rebondir rapidement, en utilisant par exemple la procédure de conciliation. Elle permet de trouver avec l’aide d’un conciliateur nommé par le tribunal de commerce un accord amiable avec ses principaux créanciers fiscaux, sociaux, des fournisseurs ou les banquiers notamment. Il sera possible au débiteur de négocier une remise de ses dettes sociales voire fiscales (excepté sur le principal des impôts indirects).

La procédure de conciliation reste confidentielle sauf si le chef d’entreprise demande l’homologation de l’accord de conciliation (distinction abordée en infra).

Avantages et modalités pratiques

Dès sa création ou en pleine activité, les difficultés doivent être surmontables par le dirigeant d’entreprise s’il opte pour la conciliation, solution préventive sous la compétence juridictionnelle du président du tribunal de commerce, qui pourra nommer un conciliateur et des experts de son choix en vue d’établir un rapport.

La conciliation permet la poursuite normale de l’activité de l’entreprise, la durée initiale peut être variable sans toutefois pouvoir excéder quatre mois et prorogeable sans que la durée totale de la procédure ne puisse être supérieure à cinq mois, sachant que le délai pour statuer sur la constatation ou l’homologation de l’accord est exclu de la durée maximale.

Sur la compétence territoriale, pour une société française et exerçant une activité commerciale ou artisanale, le dirigeant devra se rapprocher du tribunal de commerce du lieu de son siège social ; si la société a son siège à l’étranger, le tribunal de commerce compétent sera celui du centre principal de ses intérêts en France. Il ne sera pas abordé ici le cas particulier des sociétés relevant de la compétence exclusive de tribunaux de commerce spécialisés, au nombre de dix-huit en France, compétents en fonction de critères de seuils en chiffre d’affaires ou d’effectifs salariés, allant bien au-delà de ceux de la TPE.

Il est essentiel de rappeler qu’en cas de cessation des paiements supérieure à 45 jours, une conciliation ne peut être ouverte ; en outre une nouvelle conciliation ne peut intervenir qu’après trois mois suivant l’expiration de la durée d’une conciliation précédente.

La finalité essentielle de la procédure préventive de conciliation reste de favoriser la conclusion, entre le dirigeant débiteur et ses principaux créanciers, d’un accord pour mettre fin aux difficultés de la société.

Le dirigeant devra en conséquence présenter des propositions pour sauver son entreprise et sous certaines conditions, préparer sa cession qui sera alors mise en œuvre dans le cadre d’une procédure collective ultérieure, appelée « Pré-pack cession ».

En cas d’échec de la conciliation entre les parties, le débiteur en tire les conséquences, mais d’autres issues sont possibles. À tout moment, à sa demande ou de celle du conciliateur, il peut être mis fin à la conciliation. L’ouverture d’une procédure collective de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin de plein droit à la procédure de conciliation. Par ailleurs, le dirigeant, qui aura élaboré un projet de plan visant à assurer la pérennité de sa société, peut demander l’ouverture d’une procédure de sauvegarde accélérée, si les conditions suivantes sont respectées :

– L’état de cessation des paiements est inférieur à 45 jours au jour de la date de la demande d’ouverture de la conciliation ;

– Les comptes ont été certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable.

Dans cette procédure préventive de la conciliation,
qui peut être conciliateur ?

Toute personne peut être désignée conciliateur, sur proposition ou non du dirigeant de l’entreprise, mais sous réserve d’être en conformité avec les dispositions de l’article L611-13 du Code de commerce, notamment celle interdisant à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans, d’exercer le mandat de conciliateur.

Le mandat du conciliateur est en principe personnel selon les règles du Code civil, ce qui suppose que si le président du tribunal de commerce nomme une personne morale, il désigne alors en son sein une ou plusieurs personnes physiques pour la représenter dans l’accomplissement du mandat qui lui est confié. Par propositions du conciliateur, les conditions de sa rémunération sont transmises sans délai par le greffier au ministère public, et le président du tribunal de commerce ne pourra alors ouvrir la conciliation qu’après avis du ministère public ou avant l’expiration d’un délai de 48 heures à compter de la transmission par le greffier.

Des experts peuvent-ils être nommés
durant la procédure ?

Il est également possible que des experts puissent intervenir lors de la conciliation, à tout moment dans la procédure, sur le choix du président du tribunal de commerce en vue d’établir un rapport sur la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur.

Quelles conséquences après une conciliation ?

Deux possibilités dans la finalité essentielle de la procédure de conciliation : constat d’homologation par le président du tribunal de commerce ou homologation de l’accord par ledit tribunal.

Sur les effets communs de l’accord constaté par le président du tribunal de commerce, restant totalement confidentiel, ou de l’homologation de l’accord par le tribunal avec parution au BODACC et dans un support d’annonces légales, la conciliation interrompt ou interdit toute poursuite individuelle dans le but d’obtenir le paiement des créances qui font l’objet de l’accord, comme de la règle de la capitalisation annuelle des intérêts prévue au Code civil à l’article 1343-2 ne peut pas s’appliquer. Les personnes coobligées, ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir des dispositions de l’accord constat ou homologué, ainsi que des mesures accordées au dirigeant débiteur.

À l’homologation de l’accord uniquement, il y a :

– La levée de plein droit de toute interdiction d’émettre des chèques pour celle mise en œuvre à l’occasion d’un rejet de chèque émis avant l’ouverture de la conciliation ;

– Le privilège d’argent frais ou « new money », accordé aux créanciers faisant un apport de trésorerie ou ceux fournissant un bien ou service en vue d’assurer la pérennité de l’entreprise, mais dans tous les cas la caducité ou la résolution de l’accord amiable ne prive pas d’effets les clauses dont l’objet est d’organiser les conséquences de la conciliation.

Le droit commun s’applique en cas de licenciement comme en matière de revendication ou de restitution demandée par les créanciers.

La conciliation permet au dirigeant de conserver :

– Ses fonctions normalement et ses parts sociales ou actions de la société ;

– La fixation de sa rémunération

– L’inapplication de sanctions pénales et de sanctions patrimoniales civiles telles que l’interdiction de gérer ou la faillite personnelle.

Pour terminer, quand le dirigeant débiteur pressent des problèmes économiques dans sa société, le tribunal de commerce, le greffe, les professionnels du droit et du chiffre sont tout désignés pour apprécier les difficultés et l’orienter préventivement pour réagir afin de pérenniser l’activité.

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