Classique / Direction artistique de plusieurs festivals, sortie d'un nouveau CD, l'ambassadrice du violoncelle français, grande dévoreuse de kilomètres, mérite bien une pause sur la terre de son enfance, pas plus de 24 heures...
Entre deux TGV, elle apparaît, lumineuse comme toujours, sourire radieux qui abat les montagnes et soulève les âmes, humble et vrai. L'occasion pour nous de retrouver la trépidante musicienne, qui ne s'égare jamais dans la flagornerie endémique et pailletée de la "planète classique". De son CD consacré à Saint-Saëns chez Harmonia Mundi, elle livrera au public de l'Opéra de Saint-Étienne le célèbre Premier Concerto. Toujours très impressionnant par sa redoutable virtuosité, il est aussi l'occasion pour les interprètes d'apposer leur sceau sur des enregistrements de légende. Interrogée sur ce "silence habité" précédent l'exécution d'une page aussi célèbre, elle confie : « La plupart des concertos débutent par une introduction de l'orchestre seul, un temps d'introspection pour le soliste, entrant peu à peu dans l'œuvre. Le Premier Concerto de Saint-Saëns, à l'inverse, commence à vif, sans aucune préparation. Il propulse interprète et auditeur dans le tumulte de l'œuvre, un concerto d'un seul tenant, sans interruption entre les mouvements. Un peu comme le déroulement d'une vie, comportant passion, errance ou émerveillement ! »
La vraie merveille !
Alors comment aborder un tel monument ? L'artiste doit-il chercher à imprimer sa marque pour se distinguer ou n'être qu'un simple relais ? « Assurément, cette œuvre donne le sentiment d'incarner le "héros" d'une grande aventure, qui prend vie dans la confrontation entre le soliste, l'orchestre, le chef, mais aussi le public » poursuit-elle. « Ce concerto est magnifiquement bien conçu pour le violoncelle. Utilisant un vaste registre de modes de jeux, expressifs ou virtuoses, il transcende le langage romantique. Avec en prime, cette touche d'élégance "à la française", il continue de susciter l'enthousiasme bien au-delà de nos frontières. Je dis souvent à mes étudiants que certaines musiques se racontent et d'autres s'incarnent. C'est le cas de celle-ci ! » Le mélomane stéphanois sera, bien sûr, au rendez-vous de son égérie, trop rare, comme les grands crus... « C'est une émotion très particulière pour moi que de partager cette œuvre avec le public stéphanois, une manière de lier les sources de mes origines à la fois affectives et artistiques. » Les absents, qui, on le sait depuis longtemps, ont toujours tort, rangeront le CD dans leur "discothèque idéale".
Contes russes / Concerto en la mineur de Saint-Saëns, par Emmanuelle Bertrand, violoncelle et José Luis Dominguez, direction, jeudi 18 mai à 20h à l'Opéra de Saint-Étienne + rencontre d'avant-spec. avec E. Bertrand 1 heure avant la représentation