Sabine Longin, nouvelle directrice générale des Biennales : « L'erreur serait de ne rien changer »

Biennales / À quelques mois de la 17ᵉ édition de la Biennale de Lyon Les voix des fleuves / Crossing the water qui débutera le 21 septembre 2024, Sabine Longin (directrice générale du musée Picasso-Paris) a pris le poste de directrice générale des deux Biennales. Une nomination qui vise à développer les partenariats et faire rayonner internationalement les Biennales de Lyon.

C’est un retour en terrain connu pour vous, vous avez d’ailleurs commencé votre carrière en tant que coordinatrice artistique de la Biennale au sein du Musée d’art contemporain de Lyon de 1994 à 1996. 

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Ma toute première expérience professionnelle était un stage au Musée d’art contemporain de Lyon. Cela m’a permis de rencontrer un commissaire américain, qui m’a invitée à effectuer un second stage à la Thread waxing space, à New York. Quand je suis rentrée à Lyon j’ai voulu remercier le MAC, et c’est là que Thierry Raspail m’a proposé un poste d’assistante à la Biennale, où j’ai aussi travaillé aux côtés de Thierry Prat [cofondateurs de la Biennale en 1991 ndlr]. Cette année-là, on a présenté un état de l’art des créations liées aux nouvelles technologies. Ç'a été un carton absolu, à la fois très innovant et très populaire. Après, ils m’ont gardée pour la communication, puis en tant que VRP pour les artistes. Même quand je suis partie, les Biennales ont toujours fait partie de ma vie, car je m’y rendais comme professionnelle mais aussi comme visiteuse.

Les Biennales de Lyon sont uniques en France, entre 40 et 50% des œuvres sont des créations, des commandes réalisées pour les Biennales. En danse, comme en art contemporain, qui permettent l’émergence d’œuvres aussi exceptionnelles que la pièce d’ouverture de la Biennale de Christos Papadopoulos [Mycelium ndlr]. C’est une démonstration de démocratisation culturelle rare, je suis vraiment contente d’y prendre part. 

Quelle lecture faites-vous du territoire ?

Il y a énormément d’opérateurs auxquels je suis très attachée, je suis une mordue de Quais du polar par exemple. Quand je pense au fait de revenir à Lyon, je pense aussi à revenir en région lyonnaise, et même plus loin. Il y a des villages au fond de la Maurienne [vallée alpine en Savoie], comme Bonneval-sur-Arc qui aimeraient monter un musée. Ce peut aussi être le rôle des Biennales de les accompagner. 

Votre poste existait déjà, mais les attendus ont changé, il s’agit plutôt de faire rayonner les Biennales.

C’est un travail qui s’écrit à plusieurs, notamment avec les directeurs artistiques des deux Biennales, Tiago Guedes et Isabelle Bertolotti. Les fruits de notre travail ne se verront pas tout de suite, il faudra d’abord faire un état des lieux, réfléchir ensemble à comment repenser la place des Biennales à Lyon et dans le monde.

L’erreur serait de ne rien changer, de ne pas prendre le tournant du 21ᵉ siècle, de manquer d’ambition. Les enjeux sont grands, il faut s’adapter aux nouveaux publics, aux nouveaux outils, repenser les accueils de groupe, les horaires, sans jamais s’interdire de question. Tout ça sans rogner sur la qualité, car l’important reste toujours ce qu’on va montrer : l’œuvre.

Vous avez eu une carrière internationale à l’Ambassade de France au Qatar ainsi qu’avec la fondation Giacometti. Vous devez notamment « ouvrir les Biennales sur le monde ». Comment comptez-vous faire ?

Pour que les Biennales restent à Lyon, il va falloir les valoriser nationalement et internationalement. On va retravailler notre positionnement : qu’est-ce qu’on raconte comme histoire, avec qui doit-on forger de nouveaux partenariats, des coproductions et penser une circulation des œuvres, des dialogues internationaux. En soi, ça ne va pas changer beaucoup de ce qu’on fait déjà, mais on va davantage insister sur le label Biennales, s’assurer de rester une référence mondiale.

Jusqu’à 2022, vous avez été la directrice générale du Musée national Picasso-Paris. Aux côtés de la présidente du musée Cécile Debray, vous avez créé la Fondation Académie des beaux-arts qui soutient le musée dans ses activités et missions. Allez-vous proposer quelque chose de similaire pour les Biennales ?

Au musée national Picasso-Paris, on a créé un outil qui a vocation à trouver en trois ans entre 10 et 15 millions d’euros. On a donné à nos mécènes un accès privilégié au lieu, à tous les événements de l’académie mais aussi à nos académiciens ainsi qu’à des lieux associés à l’académie sans jamais que le musée ne devienne un lieu événementiel. L’outil qu’on a créé au musée Picasso n’est pas ad hoc, chaque recherche de mécénat est vraiment spécifique.

Une de mes missions sera effectivement de trouver un outil approprié pour attirer les mécènes de la France et de la Région aux Biennales. Offrir un partenariat qui impliquera les mécènes avant chaque Biennale et après chaque Biennale, penser à les faire rencontrer nos artistes en résidence par exemple. J’ai compris que les mécènes veulent surtout avoir des moments privilégiés avec la création en train de se faire.

Les Biennales ont subi des baisses de subventions, notamment de la Région. Est-ce l’une des raisons pour lesquelles il est urgent de trouver d’autres financements ?

Je prends acte de ces baisses. Il existe d’ailleurs un travail à mener en lien avec l’ensemble des tutelles, les quatre financeurs des Biennales. Je pense qu’il faudra qu’on se rassoit ensemble, et qu’on reparle des ambitions des Biennales, en fonction de chaque projet ; qu’on sache si on est tous d’accord sur l’importance de la place donnée aux créations. J’aimerais vous dire que les tutelles seront en hausse, mais ce n’est vraiment pas sûr, alors il va falloir inventer d’autres modèles pour continuer à être ambitieux. 

Je ne sais pas, en revanche, si on peut parler d’urgence. Quand on veut monter en ambition, on ne le fait pas sans un soutien. Dire qu’on va arriver à trouver du financement privé tout de suite serait présomptueux, et continuer à cheminer avec les acteurs publics est plus que nécessaire, car nous ne sommes pas une foire, mais une proposition culturelle forte, d’utilité publique.

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