Entretien / Galeshka Moravioff, propriétaire des CNP, réagit aux rumeurs de fermeture des cinémas.Propos recueillis par Dorotée Aznar
Galeshka Moravioff : Aujourd'hui, il n'est pas question de fermer les CNP. Nous avons effectivement un problème de financement et j'en appelle aux collectivités locales afin de trouver une solution.À quoi est due la baisse de chiffre d'affaires des CNP ?
Aujourd'hui, nous sommes dans une situation concurrentielle très compliquée. Depuis le début, les CNP ont toujours été dans une situation de fragilité, notamment en raison de la concurrence avec UGC.La masse salariale (26 employés) est-elle également problématique ?
Non, le problème est bien plus vaste qu'une simple question de masse salariale. Même si le personnel est en partie responsable de la situation actuelle.En quoi le personnel est-il responsable de cette situation ?
Lorsque que j'ai racheté les CNP (à Roger Planchon, en 1998, NdlR), j'avais proposé un plan de restructuration qui prévoyait le licenciement d'un certain nombre de personnes. Des grèves ont suivi et j'ai du abandonner. Ne pensez-vous pas que le vieillissement des équipements est responsable en partie de la désaffection du public pour les CNP ?
C'est l'argument de tout le monde ! Or, la modernisation des équipements n'est pas en cause. Le CNP Bellecour a perdu 35% de sa fréquentation en dépit des rénovations effectuées ! Les conditions d'accueil du public sont un détail, aujourd'hui nous sommes confrontés à des problèmes à plus court terme.Selon vous, c'est donc la concurrence le principal problème ?
Oui. Les collectivités locales et le Centre national de la cinématographie (CNC) ont accordé 600 000 euros au Comoedia. Pourtant, le Comoedia est dans une situation fragile. La municipalité a suivi une politique pro «méga-complexes» cinématographiques et aujourd'hui les multiplexes perdent également de l'argent... La situation des cinémas en général est très difficile.Vous avez également une difficulté d'accès aux films ?
C'est le chat qui se mort la queue. Quand un distributeur a le choix, il préfère des salles où le film est programmé sur plusieurs écrans. Depuis deux ans, l'art et essai «porteur» est aux mains des major compagnies et le cinéma d'auteur indépendant n'est pas performant en termes commerciaux. Souhaitez-vous vendre les CNP ?
Non, ma volonté n'est pas de vendre.Vous ne souhaitez pas vendre les CNP, quelles sont les solutions que vous envisagez ?
Peut-être délocaliser certaines salles ailleurs ; trouver un lieu pour créer de nouvelles salles plutôt que d'investir dans des travaux pour des salles à l'avenir incertain... Il y a également la possibilité de développer mes emplacements actuels et de passer au numérique sur l'ensemble de mes salles. Cette délocalisation des CNP est-elle un projet à court terme ?
Non, j'attends de voir ce qui va se passer dans les mois à venir.Vous avez été reçu par le maire de Lyon ?
Non, il ne m'a pas reçu et il n'a pas l'air très ému de la situation. Tout le monde semble s'en foutre, or je suis un entrepreneur : si on m'encourage à fermer mes salles, je les fermerai.Vous êtes pessimiste ?
Non, je suis pragmatique. J'ai rencontré les gens du CNC et ceux de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC). Tout est sauvable, s'il y a une volonté politique. Après, la question est de savoir si on a besoin des CNP aujourd'hui pour sortir des films qui ne marchent pas...