De Mariana Otero (Fr, 1h28) documentaire
Déjà sensible dans "La Loi du collège", le regard de Mariana Otero est celle d'une vraie documentariste de cinéma ; "Entre nos mains" en fait une nouvelle fois la preuve. Une entreprise de lingerie féminine est au bord de la faillite. Ses employés (commerciaux et ouvrières) décident de la sauver en se montant en coopérative (SCOP, selon la terminologie juridique). Otero va accompagner le cheminement incertain de ces héros ordinaires du travail, qui cherchent à remettre leur destin professionnel entre leurs mains. Si la cinéaste ne cache pas son empathie pour leur combat, elle sait transformer son militantisme en partis pris de mise en scène : la patience avec laquelle elle fait exister tous les personnages et dessine, sans sortir de l'usine, des destins privés à travers quelques conversations ordinaires, mais aussi des gestes, des regards, des lapsus, fait la force du film. Il y a même un certain suspense à connaître l'issue de cette utopie fragile se heurtant contre les rochers coupants de la réalité économique. In fine, cette utopie se traduit par un rêve de cinéma : une petite comédie musicale à la Jacques Demy où chaque salarié se met à chanter les louanges de la SCOP. Casse-gueule, cette séquence est portée, comme le reste, par la dignité et la beauté de ses interprètes amateurs. CC