Théâtre / Si jeunes soient les membres de la compagnie jeune Nöjd («heureux» en suédois), ils s'emparent avec crédibilité de "La Musica deuxième" de Marguerite Duras. Un homme et une femme reviennent dans l'hôtel d'Évreux où ils se sont fait follement aimés avant de laisser mourir leur amour dans la maison qu'ils ont achetée pour «faire comme tout le monde». Ils ne se sont plus vus depuis quatre ans. Ils viennent ici acter leur divorce et se ré-apprivoisent comme des animaux blessés. Leurs gestes sont heurtés, parfois brusques, voire incongrus, mais toujours justes. Pas besoin d'avoir des rides au coin des yeux pour faire croire à la profondeur de l'amour passé. Les personnages ne s'épargnent pas, se relatant leurs infidélités dans une langue raide, rugueuse, sans atermoiements et sans haine. Ils ne cessent de se désirer, sondant l'épaisseur de leur douleur. Dans un vouvoiement constant, il lui dit : «je suis venu voir voir comment vous étiez sans moi, comment c'était possible, ce scandale, comment nous étions l'un sans l'autre». Nöjd fait du public un acteur de son travail comme récemment dans "Yvonne princesse de Bourgogne" (repris à Villefranche-sur-Saône le 29 mars) : les spectateurs sont pris à témoin de la vie qui vacille. Ici, en introduction, un sosie de Duras explique aux spectateurs où se passe l'action. Le drame peut alors commencer dans cet espace suffocant. Nadja Pobel
La Musica deuxièmeAu théâtre de Vénissieux, du mardi 15 au samedi 19 mars