Ailleurs / Des metteurs en majeurs se sont emparés très tôt des textes de Sarah Kane et en ont livré un travail aussi radical que l'écriture de la Britannique et porté par de très grands acteurs. Preuve par l'exemple avec sa première pièce "Anéantis" (1995) mise en scène par Thomas Ostermeier en 2005 et sa dernière, "4.48 Psychose" (2000), portée à la scène par Claude Régy en 2003. Nadja Pobel
Ailleurs / Des metteurs en majeurs se sont emparés très tôt des textes de Sarah Kane et en ont livré un travail aussi radical que l'écriture de la Britannique et porté par de très grands acteurs. Preuve par l'exemple avec sa première pièce "Anéantis" (1995) mise en scène par Thomas Ostermeier en 2005 et sa dernière, "4.48 Psychose" (2000), portée à la scène par Claude Régy en 2003. "Anéantis"
Quand Thomas Ostermeier monte Anéantis en 2005, cela fait déjà dix ans qu'il souhaite créer la pièce. Il en respecte les nombreuses didascalies et plonge au cœur de ce récit horrifique largement inspiré par le conflit en Serbie. Dans la première partie du texte, un journaliste de guerre (campé par Ulrich Mühe qui n'avait pas encore été mondialement reconnu pour le film La Vie des autres) et son amante vivent une relation chaotique mais la violence se déplace de la sphère privée à la sphère collective avec l'arrivée d'un soldat qui mange les yeux du journaliste avant que ce dernier ne le tue. Ostermeier ne se défile jamais et regarde la barbarie en face (on «voit» des yeux crevés, un viol, un homme manger de la chair humaine). Rappelant en de nombreux détails le travail du cinéaste de Gaspar Noé (Seul contre tous, Irréversible), Ostermeier livre un spectacle d'un réalisme sidérant.
4.48 Psychose
En choisissant en 2003 le texte de Sarah Kane, 4.48 Psychose, Claude Régy trouve une pièce qui correspond incroyablement bien à l'ascétisme de ses mises en scène. Il place Isabelle Huppert, sans apparat (tee-shirt bleu, pantalon noir, peu de maquillage), au centre du plateau. Droite, les bras le long du corps, elle ne bouge pas un cil et habite le corps emmuré de Sarah Kane qui dit sa douleur de vivre et imagine de manière prémonitoire sa mort par pendaison au plus fort de ses souffrances, le matin, à 4h48. Tout est fait pour servir le texte et embarquer le spectateur qui dépasse cette âpreté à la frontière de la conscience et l'inconscience, de réalité et du cauchemar, de la vie et de la mort. Une expérience.