Théâtre / Arrivant en fin de bail le 31 décembre prochain, le Théâtre de l'Iris pourrait être obligé de claquer la porte comme dans une pièce de boulevard. Mais la résistance s'organise pour que ce lieu perdure. Nadja Pobel
On ne va pas se mentir, nous n'avons pas toujours soutenu bec et ongles dans ses colonnes les spectacles présentés à l'Iris. Pourtant, cela ne nous empêche pas de défendre ardemment l'existence de ce lieu culturel pour que toute la diversité trouve sa place dans l'agglomération lyonnaise. Il y a donc lieu de s'alarmer des difficultés que ce théâtre rencontre aujourd'hui après 22 ans d'existence qui n'ont, certes, jamais été un long fleuve tranquille. Lorsqu'en 1988, Philippe Clément (toujours directeur) installe sa compagnie de l'Iris dans ces murs du quartier Cusset, il fait tout de concert avec sa bande d'une quinzaine de comédiens : travaux de mise en conformité de cet ancien cinéma, administration, technique. Ils montent des classiques (Molière, Ionesco), des contemporains (Audiberti, Duras), des adaptions littéraires (Maupassant, Diderot) et des spectacles plus improvisés qui se créent au plateau (comme récemment Le Loup dans mon œil gauche, sur l'art brut). Plus qu'un lieu de création, Philippe Clément a bâti un endroit où se tisse un véritable lien social, ce qui pour lui est "aussi important que la création". L'équipe de l'Iris travaille en effet avec les habitants du quartier, dispense des cours d'art dramatique et s'est associée avec l'École Nationale de Musique de Villeurbanne (notamment un 3e cycle unique en France alliant le théâtre et la musique). C'est d'ailleurs pour l'ensemble de toutes ces missions que la mairie de Villeurbanne a signé début 2011 un contrat triennal avec eux.
Monsieur chasse
Problème : toute cette aventure est assise sur du sable. Ou plus exactement sur un bail renouvelable tous les six ans. Loué à un prix modique, le bailleur a fait savoir, comme il y a six ans, sa volonté de récupérer son bâtiment pour vraisemblablement y construire des immeubles. Le Théâtre de l'Iris (qui fonctionne à parts égales par l'autofinancement et les subventions) serait donc expulsable au 31 décembre. Mais une ordonnance relative aux spectacles datant du 13 octobre 1945 stipule qu' «aucune salle de spectacle (...) ne peut être démolie sans que le propriétaire ait obtenu l'autorisation du ministre chargé de la culture». Or le bailleur n'a adressé aucun courrier audit ministère. La demande de quitter le local fin 2011 est donc non-avenue pour le moment. L'équipe du théâtre assure qu'elle terminera sa saison mais ne peut pas envisager la suivante. Une pétition a déjà recueilli plus de 4000 signatures. En attendant les suites de ce combat, the show must go on et l'Iris propose d'entendre le déchirant texte de Marguerite Duras, La Douleur, du 8 au 12 novembre.