De Djinn Carrenard (Fr, 2h13) avec Emilia Derou-Bernal, Sékouba Doukouré...
Autoproduit pour 150€ (chiffre officiel), Donoma ouvre de toute évidence une brèche dans le système du cinéma français. Mais attention, cette brèche économique salutaire ne se reflète sur l'écran qu'à travers une image brute de chez brut, un son plat et un récurrent problème de focus. Car pour l'essentiel — ce que Djinn Carrenard a à dire et ce qu'il fait passer grâce à ses comédiens, Donoma est un film très français, qui privilégie la parole à l'action, la chronique anecdotique au grand récit. Rien que du déjà-vu (la banlieue, la maladie, la religion, l'amour), mais rarement avec une telle pugnacité pour faire surgir à l'écran une vérité des sentiments âpre, douloureuse, cruelle, parfois lourdingue, parfois touchante. Là où Carrenard se démarque de Maiwenn (l'anti-structure du film et son goût pour le réalisme cru poussent au rapprochement), c'est que lui croit encore à la fiction, à l'épaisseur d'un cinéma qui, même minimaliste dans ses moyens, cherche la fulgurance par un raccord inattendu, une image bizarre, une impasse de dialogue. Imparfait, inégal, trop long, Donoma a un mérite : il réinvente avec innocence et naïveté la manière de filmer des histoires.
Christophe Chabert