Mutatis mutandisque

Mutatis mutandisque

Avant d'être cette somme caricaturale de sirène boréale, d'elfe panthéiste, d'étoile polaire et autres noms exotiques dont les journalistes issus d'ex-puissances coloniales l'ont souvent affublée, Björk peut d'abord et surtout prétendre au titre de mutante. Elle l'a chanté haut et fort sur Pluto : «I just have to explode, explode this body». Et elle l'a fait, systématiquement, que ce soit dans ses clips (merci Michel Gondry) ou sur ses différentes pochettes de disques. On l'a connue femme enfant mutine sur Debut, geisha cybernétique sur Homogenic, femme cygne au tournant de Vespertine, puis revenant de plein pied à ses foudres animistes sur Volta. Grimée comme une sorcière, danse du feu et peintures de guerre, l'explosif prédécesseur de Biophilia annonçait un «necessary voodoo». Mutatis mutandis, alors que les paroles de Pluto concluaient sur un «Wake up tomorrow, brand new», revoilà Björk qui renaît de ses cendres, toute ravalée en rousse orangée, perruque de façade pour imbroglio d'applications iPad. Plastiquement parlant, c'est parfait, les visuels des graphistes M/M sont au sommet de leur art. Le cygne astral de la nébuleuse Biophilia renoue avec celui de Vespertine, bouclant la boucle d'un phénix à son zénith.

Musicalement, c'est plus compliqué, on s'empêtre autant dans ce dédale interstellaire que dans la masse capillaire. On mesure alors les décennies qui se sont écoulées depuis le temps béni où Björk clamait «I wish simplicity». L'esthète qu'elle a toujours été a cependant trouvé son plus beau rôle mutant non sur disque, mais sur grand écran. À la fin du sublime film de son boyfriend Matthew Barney, Drawing Restraint 9, les deux héros-amants se coupent les jambes pour se transformer en cétacés. La métamorphose est à l'image de son obsession pour l'océan... En osmose avec le maître élément d'une sirène qui a toujours considéré les continents comme de simples îles, et l'Humain comme un être qui se doit d'aller de l'avant.

Stéphanie Lopez

à lire aussi

vous serez sans doute intéressé par...

Vendredi 29 juin 2012 Comment parler de ce concert à venir d'Antony au Théâtre Antique, sans évoquer celui que l'Anglo-New-Yorkais donna en 2009 avec l'orchestre de l'Opéra de Lyon dans des conditions similaires. La nuit tombait doucement sur Fourvière, le vent soufflait...
Jeudi 28 juin 2012 C’est peu dire que la mort est en pleine forme dans la dernière création de Bartabas, Calacas. Au-dessus de nos têtes, dans notre dos, devant nos yeux, les morts sont partout et triomphent dans un ballet équestre ébouriffant. Nadja Pobel
Vendredi 22 juin 2012 Cela fait neuf ans que Les Nuits de Fourvière en rêvaient. Björk Gudmundsdottir, fille de Gudmund et de l’étoile Polaire, nous prouvera samedi 30 juin que 2012 est bel et bien l’année du changement : en étant présente, tout simplement. Stéphanie...
Vendredi 22 juin 2012 Dominique Delorme, le directeur des Nuits de Fourvière, revient sur neuf ans de gestation avant l’événement. Propos recueillis par Stéphanie Lopez

Suivez la guide !

Clubbing, expos, cinéma, humour, théâtre, danse, littérature, fripes, famille… abonne toi pour recevoir une fois par semaine les conseils sorties de la rédac’ !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X